Publié dans le Quotidien Jurassien le 2 février 2018
Lai coudri
È y aivait ènne coudri che aivâr’ciouse qu’elle airait tonju ïn ue. Ïn bé soi, ènne poûere fanne mâ véti yi d’maindait l’aiboèrdge. Lai coudri sâte chu l’écouve èt lai fot en lai poûetche. Lai tainte Airie – poéche que c’était lée – s’en allé caquaie en lai poûetche di tchairboénie. C’était des poétche-guenipes sains l’ sô èt qu’aivïnt ènne rote d’afaints. Lai fanne yi bèyé ïn triquèt de noi pain, de l’âve di pouche èt peus lai f’sé coutchi dains son yét. «
N’ vôs en faites pe po nôs, Daime. Mon hanne èt peus moi, nôs v’lans dremi dains l’ bola és bèrbis. Ç’ n’ât p’ le premie côp.
»
Le lendemain maitïn, lai tainte Airie yi dit : «
En te r’méchiaint. I seus lai tainte Airie. Poéche que t’és aivu d’ l’échprit po moi, lai premiere besoingne que te f’rés tiaind qu’i s’rés paitchi s’ veut faire de pai lée, sains râte, djunqu’en lai roue neût.
»
Lai tchairboéniere se dépâdgé d’allaie ch’couaie ses blouchies â vardgie èt djunqu’â soi, les bèlles bloueches tchoiyïnt, c’en était tot grebi dos les aibres. Èlle récrié lai coudri qu’èlle venieuche voûere. «
Venis, véjinne, ç’ât ïn miraîçhe, qu’i vôs dis. Prentes-en d’ ces bloueches, taint qu’vôs v’lèz.
»
Lai métchainne coudri en feut tot ébâbi èt brâment djaiyouse. Èlle é rempiâchu des p’nies de bloueches. De r’toué en sai tâle de coudri, èlle se promé de meu r’cidre en l“aiv”ni les aimeunies que poérrïnt v’ni caquaie en sai poûetche. Mains, bïn fait po lée, lai tainte Airie n’ât pus r’veni.
d’après Jules Surdez
Notes
l’aiboèrdge, l’hospitalité
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Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis
La couturière
Il y avait une couturière si avare qu’elle aurait tondu un oeuf. Un beau soir, une pauvre femme mal vêtue lui demande l’hospitalité. La couturière brandit son balai et la flanque à la porte. La fée Arie – car c’était elle – s’en alla frapper à la porte du charbonnier. C’étaient des miséreux sans le sou et qui avaient une ribambelle d’enfants. La femme lui offrit une tranche de pain noir, de l’eau du puits et la fit coucher dans son lit. «
Ne vous en faites pas pour nous, Madame. Mon homme et moi, nous dormirons dans l’étable avec les brebis. Ce n’est pas la première fois.
»
Le lendemain matin, la fée Arie lui dit : «
Je te remercie. Je suis la fée Arie. Comme tu as été prévenante avec moi, la première tâche que tu entreprendras après mon départ s’accomplira d’elle-même jusqu’à la nuit complète.
»
La charbonnière courut au verger secouer ses pruniers et, jusqu’au soir, les belles prunes tombaient
; le sol en était jonché. Elle appela la couturière : «
Venez, voisine. C’est un miracle, je vous dis. Servez-vous de ces prunes, prenez-en tant que vous voulez.
»
La méchante couturière fut tout étonnée et en éprouva une profonde jalousie. Elle remplit des paniers de prunes. De retour à son atelier, elle se promit de mieux recevoir à l’avenir les miséreux qui frapperaient à sa porte. Mais – bien fait pour elle – la fée Arie ne revint plus.
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La chronique patoise du
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