Djasans
Patois Jurassien

Djasans Patois Jurassien

De la soupe au menu du jour
D’ lai sope â m’nu di djoué
Bernard Chapuis
Article mis en ligne le 21 juin 2024

par Fleury Louis-Jos.

Publié dans le Quotidien Jurassien le 21 juin 2024 .

D’ lai sope â m’nu di djoué

Ci réchtaurant gaichtronomitye ât coégnu dains tote lai Suisse èt meinme d’ l’âtre sens d’ lai frontiere. È y vïnt des diridgeous, des banquies, des politityes. Èt , craiyietes-me, ès ne v’niant pe po ènne pizza, èt peus ès ne ravoétant pe ch’ le prix. Les dyïmbardes que sont râtès ch ‘lai pyaice derie poétchant des pyaiques de Baîle, de Genève o bïn de Zürich. Des pyaiques JU, è n’y en é pe brâment. Nôs dgens n’aint p’ les moiyïns.

Yun d’ ces rètches clients ât aittaibyè dains l’ poiye d’vaint ènne fenétre que bèye ch’ le parc. An voit les aibres que s’ bailainchant dains l’oûere douçatte di paitchi-feu. Le sèrvou yi é tendu lai câtche des pyaits èt lai câtche des vïns. È se tïnt drassie d’vaint lu d’aivô réchpect.

- I vois chu le m’nu di djoué qu’è y é potaidge èt entrèe. Ç’ât yun o l’âtre ?

- Ç’ât cment vôs v’lèz, Chire. Vôs poéyèz aivoi les dous.

- Po aicmencie, i veus pâre le potaidge.

Le client raivoéte le potaidge que le sèrvou yi é aippoétchè, yeuve les euyes chu ci brave hanne èt yi dit d’ïn air chtrèngue :

- I n’ peus p’ maindgie ci potaidge.

Le client é aidé réjon, chutot dains ïn tâ réchtaurant.

- Peu de tieusain, Chire, i vôs en veus poétchaie ïn âtre.

Le sèrvou poje le doûejieme potaidge d’vaint le client èt fait sai corbatte.

- È m’en encrât, dit l’ client ïn pô raidouci, mains i n’ serôs maindgie ci potaidge.


Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

De la soupe au menu du jour

Ce restaurant gastronomique est connu dans toute la Suisse et même de l’autre côté de la frontière. Il y vient des directeurs, des banquiers, des personnalités politiques. Et, croyez-moi, ils ne viennent pas pour une pizza, et ils ne regardent pas au prix. Les voitures qui sont garées derrière portent des plaques de Bâle, de Genève ou de Zürich. Des plaques jurassiennes, il n’y en a pas beaucoup. Les gens d’ici n’ont pas les moyens.

Un de ces riches client est attablé dans la salle devant une fenêtre qui donne sur le parc. On voit les arbres qui se balancent dans la douce brise du printemps. Le serveur lui a présenté la carte des plats et la carte des vins. Il se tient respectueusement devant lui.

- Sur le menu du jour, je vois qu’il y a potage et entrée. C’est l’un ou l’autre ?

- C’est comme vous voulez, Monsieur. Vous pouvez avoir les deux.

- Pour commencer, je prendrai le potage.

Le client regarde le potage que le serveur lui a apporté, lève les yeux vers ce brave homme et lui dit d’un air bourru :

- Je ne peux pas manger ce potage.

Le client a toujours raison, surtout dans un tel restaurant.

- Pas de souci, Monsieur, je vais vous en apporter un autre.

Le serveur pose le deuxième potage devant le client et fait sa révérence.

- Je regrette, dit le client un peu radouci, mais je ne peux pas manger ce potage.

Cette fois, le serveur ne comprend plus. Le client :

- Comment voulez-vous que je mange cette soupe sans cuiller.

Ci côp, le sèrvou ne comprend pus. Le client :
– Cment qu’ vôs v’lèz qu’i maindgeucche çte sope sains tieuyie.« »

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