Publié : 22 juillet 2016

Notre femme

Not’ fanne

Bernard Chapuis

Paru dans le Quotidien Jurassien du 22 juillet 2016

Not’ fanne

En 1925, Lucien Lièvre (1877-1958) publie Dans nos Pénates, recueil de Rimes et chansons en patois de l’Ajoie illustré de dessins de F. Garraux de Moutier. En voici un extrait :

Not’ fann’ ça lais Mairie tchie Djean ;

Tutrétu diant : oh ! Lais belle dgen !

Ais n’y en épp’ ainn’ dain le velaidge

Qu’aiveuche dïnche ïn frâs visaidge.

*

I vos dis qu’ais n’y en épp’ ainn’ tâ,

Pou avoi di bos d’vaint l’ôta !

*

Le djoué que nos nos sons mairiaie,

Sais rose tot’ fratche elle aivaie,

Aivo ïn gros rond pnie d’étius,

Tras fâcies de près poi li-d’chu.

*

I vos dis qu’ais n’y en épp’ ainn’ tâ,

Pou avoi di bïn d’â l’ôta !

*

Elle saie coudre, ell’ saie tieug’naie,

Elle saie dainsie, elle sait tchaintaie ;

Ell’ ne gremoine djemais trop

Tiain qu’i aie bu ïn p’té cô ;

*

I vos dis qu’ais n’y en épp’ ainn’ tâ,

Pou avoi de l’ouedre en l’ôta !

*

Tos les ans elle ai ïn afain ;

Ah ! se mais dg’ment en f’saie aitain,

Nos s’rïn les degens les meu piaicie

D’â Poirraintru ais Saingnledgie.

*

I vos dis qu’ais n’y en épp’ ainn’ tâ,

Pou savoi rempiâtre ïn ôta !

*

Ça pouquoi tiain qui yeuv’ mon voir,

Aivain de quemancie ais boir,

Ais m’y vïnt touedge ainn’ rude envie

Des criaie vive mais Mairie !

*

Et de dire qu’ais n’y en epp’ ainn’ tâ

Pou bïn fair’ mairtchi son ôta !

L’orthographe de l’auteur a été respectée.


Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Notre femme

Traduction de l’auteur

Notre femme, c’est la Marie chez Jean ;

Tout le monde dit : « Oh, la belle personne ! »

Il n’y en a pas une dans le village

Qui ait un si joli visage.

*

Je vous dis qu’il n’en est pas une telle

Pour avoir “du bois devant la maison” !

*

Le jour où nous nous sommes mariés,

Sa rose était immaculée ;

Avec cela, un grand panier d’écus,

Trois fauchés de prés par dessus.

*

Je vous dis qu’il n’en est pas une telle

Pour avoir du bien de la maison !

*

Elle sait coudre, sait cuisiner,

Elle sait danser, elle sait chanter.

Elle ne gronde jamais trop fort

Quand j’ai bu un trop bon coup.

*

Je vous dis qu’il n’en est pas une telle

Pour avoir de l’ordre à la maison !

*

Chaque année, elle a un rejeton.

Ah ! si ma jument en faisait autant,

Nous serions les gens les mieux placés

De Porrentruy à Saignelégier.

*

Je vous dis qu’il n’en est pas une telle

Pour savoir remplir la maison !

*

Aussi, quand je lève mon verre,

Avant de commencer à boire,

Il me vient toujours une vive envie

De crier : « Vive ma Marie ! »

*

Je vous dis qu’il n’en est pas une telle

Pour faire bien marcher son ménage.

Note

Aivoi di bôs d’vaint lai mâcon, Avoir du bois devant la maison, est une expression à double sens qui peut signifier avoir une belle poitrine.


La chronique patoise du QJ en direct :

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