AVEC LES PATOISANTS DES «
CIEUTCHATTES Dl
DOUBS »
Lai pâtche
Texte dit par Michel Cerf, accent ajoulot
Les pus moérdjus des pâtchous veniant révijaie ci Doubs, c’te che belle euviere, que pé ses pochons. Dje ces années péssaies, es aivïnt vu des âtres sortes crevaie. Mains c’t’herbà, ç’ât ces belles traites que poétchaant lai malaidie d’Iai moue. Et djeuqu’ai mitniant, an n’ïnt’p trovaie de remèdes miraîtches, mainme daivô l’éde des gouvernements. Ce n’ât’pe aigie.
Coli m’fait musaie que, tiaint i étos baichenatte, quand lai Léa Jeannerat suspendait ses felats tchu «
le boiré
» - le pont de graindge - po lai pâchtche, i aivais le piaiji de ritaie à di toué des felats.
La Léa et son hanne m’ainmaïnt bïn tôt les doues, et moi aitôt. Lai Léa me bèyait aidé ïn po âtche : des mâles à çléjies, qu’i n’ainmais’p, mains qu’i maindjais po lu faire piaji. Et nos les baichenattes, an édiait l’François è boussaie sai tchairatte de foin ou de voiyïn d’enson le v’Iaidge dj’euque d’vaint lai graindge.
I voiyais aitôt s’vent les boûebes de Mathilde Houlmann (i crais qu’elle en aivait aîvu neuf). Es péssïnt d’vaint tchie nos, bïn chûr è pies, yos pertches en bambou tchu l’épâle. Es aivïns ènne réserve de vies dains ènne p’téte bouete (les vies étïns «
creuyie
» lai voiye). Lai bouete aivait des ptchus po quès n’creuveuchïnt’p.
Es poétchïns aitôt le beuntchïn, bïn chur en bos, aidé verni en void.
C’ment es aivïnt le bie qu’è péssaie de côte d’Iai mâjon, c’était aijié de faire ïn vivier.
Un djoué d’envèllie, mai mare m’envie tchri ènne belle grande traite. Moi, i lai t’nis en lai main, mains daivo ènne feûye que boussaie è bord di Doubs. Elle se botaie es bouedjie. Moi, paivurouse, i lèche tôt tchoire pai tiérre. Mai mère me renvie tôt content lai raimessaie, mains çté côp, i prends ènne tchairpainne po la raippoétchaie
!
S’vent, c’était Joséphine Beuret di Theureux (ou d’lai Guérite) - qu’aivait, i crais, aitôt ènne rotte d’afaints – ou la véye Mathilde qui poétchait les traites en lai gaire à Pré-P’tet-Djean. Dali, elles allïns tchu les taies des gros rèchtauraints.
Hélais, è n’y aivait’p encoue de boéche po les véyes. En ci temps-li, ces qu’aivïnt prou sous po aivoi ènne vaîtche, ïn tieutchi aivint è po prés è maindgie.
{Lai Tchaindelatte}
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La pêche
Les plus mordus des pêcheurs viennent observer ce Doubs, cette belle rivière, qui perd ses poissons. Déjà ces dernières années, ils avaient vu d’autres sortes périr. Mais cet automne, ce sont ces belles truites qui portent la maladie mortelle. Et jusqu’à présent, on n’a pas trouvé le remède miracle, même avec l’aide des gouvernements. Ce n’est pas aisé.
Cela me fait penser que, quand j’étais petite fille, quand Léa Jeannerat suspendait ses filets sur le pont de grange pour les sécher, j’avais plaisir de courir entre les filets.
Léa et son mari m’aimaient bien tous les deux, et moi aussi. Léa me donnait toujours quelque chose : des «
mâles
» aux cerises, que je n’aimais pas, mais que je mangeais pour lui faire plaisir. Et nous les fillettes, on aidait François à pousser sa charrette de foin ou de regain du haut du village jusque devant la grange.
Je voyais aussi souvent les enfants de Mathilde Houlmann (je croisqu’elle en avait eu neuf). Ils passaient devant chez nous, bien sûr à pied, avec leurs perches en bambou sur l’épaule. Ils avaient une réserve de vers dans une petite boîte (les vers étaient «
creusés
» la veille). La boîte avait des trous pour qu’ils ne périssent pas.
Ils portaient aussi le vivier, bien sûr en bois, toujours verni en vert. Comme ils avaient le bief qui passait à coté de la maison, c’était aisé de faire un vivier. Un jour de visite, ma mère m’envoie chercher une belle grande truite. Moi, je la tenais dans la main, mais avec une feuille qui pousse au bord du Doubs. Elle se met à bouger. Moi, peureuse, je laisse tout tomber par terre. Ma mère me renvoie immédiatement la ramasser, mais cette fois, je prends une corbeille à anse pour la rapporter
!
Souvent, c’était Joséphine Beuret de Theureux (ou de la Guérite) - qui avait, je crois, aussi une bande d’enfants - ou la vieille Mathilde qui portaient les truites à la gare du Pré-Petitjean. De là, elles allaient sur les tables des grands restaurants.
Hélas, il n’y avait pas encore de pensions pour les vieux. En ce temps-là, ceux qui avaient un jardin et assez de sous pour acheter une vache avaient à peu près à manger.
{La Chandolatte}
W09 - 1232 Ghete 2011, mars 2011 p. 20
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