
Publié dans le Quotidien Jurassien le 16 février 2024
Ïn baboéyè
Ïn djûene hanne baidgelait, baidgelait, baidgelait. An n’ saivait l’ faire è râtaie. Niun âtoé d’ lai tâle ne poèyait pyaicie ïn mot. Èl aivait tot vu, èl aivait tot yét, è saivait tot. Ènne fanne çhiouçhé dains l’aroiye de sai véjine : « È djâse cment sïnt Dgeoûrdge, poi lai goûrdge. »


 bout d’ïn quât d’hoûere, pus niun n’ l’écoutait. Ïn véye se yeuvé. Le djûene hanne se musait : « Qu’at-ce qu’è m’ veut, çtu-ci ? » Mains è s’ coidgé tot d’ meinme.
Le véye saidge yi dit : « An t’ont léchi djâsaie ïn bon quât d’hoûere. Ci côp, ç’ât mon toué. Oh, i n’en aî p’ po grant. Ènne tote petète quèchtion. Te m’ rèponds s’ te veus. Ât-ce que t’ peus m’ dire, toi qu’és tot vu, toi qu’ és tot yét, toi que sais tot, poquoi l’ Bon Dûe nôs é bèyie dous aroiyes èt peus ran qu’ènne boûtche ? Le baboéyè, qu’aivait pavou de tchoère dains les lais, ne réponjé pe.
Notes
tchoère dains les lais, tomber dans un piège, se faire piéger
Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis
Un bavard
Un jeune homme palabrait, palabrait, palabrait. On ne pouvait l’interrompre. Personne autour de la table ne pouvait placer un mot. Il avait tout vu, il avait tout lu, il savait tout. Une femme souffla dans l’oreille de sa voisine : « Il parle comme saint George, par la gorge. »


Au bout d’un quart d’heure, plus personne ne l’écoutait. Un vieillard se leva. Le jeune homme se dit : « Qu’est-ce qu’il me veut, celui-ci ? » Cependant, il se tut.
Le vieux sage lui dit : « On t’a laissé parler un bon quart d’heure. Maintenant, c’est mon tour. Oh, je n’en ai pas pour longtemps. Une toute petite question. Tu me réponds si tu veux. Est-ce que tu peux me dire, toi qui as tout vu, toi qui as tout lu, toi qui sais tout, pourquoi le Bon Dieu nous a donné deux oreilles et rien qu’une seule bouche ?Le bavard, qui craignait d’être piégé, ne répondit pas.
