Par : Fleury LJ
Publié : 20 août 2015

Le chêne et le roseau

Le tchêne èt l’époulat

Jean de La Fontaine, traduit par Bernad Chapuis

Le tchêne èt l’époulat

{{Jean de La Fontaine}} Le Tchêne ïn djoué dyé en l’Époulat : « Vôs èz bïn des réjons d’aitiujaie lai Naiture ; Ïn Oujelat po vôs ât ènne poisainte tchairdge. Lai pus ptète brije que, des côps, Fait frognie la faice de l’âve, Vôs borge è béchi lai téte : Di temps que mon cervé, eur’channaint â Caucase, Ne s’contente peus d’râtaie les rés di s’raye, Tïnt bon tiaind choçhe le grôs temps. Tot vôs ât Vent di Diaîle, tot me sanne Brijatte. Hèy’rou s’vôs étïns nè en lai sôte d’mai feuyrie Qu’ailombre les ailentoés, Vôs n’dairïns p’taint paîti : I vôs aipûerôs dains l’oûeraidge. Mains vos boussèz le pus s’vent Ch’ les môves riçhattes des Réyâmes di Vent. Lai Naiture po vôs me sanne bïn mâdjeûte. - Vot’ pidie, yi réponjé l’Aîbrâ, Paît d’ïn bon seintou ; mains léchietes ci tieusain. I aî bïn moins paivou qu’vôs des hoûeres. I m’aiçhe sains m’ébriquaie. Djunqu’aidonc, vôs èz Contre yos épaivuraints rouffyes Eur’jippè sains corbaie le dôs. Mains aittendans le tierme. « C’ment qu’è djasait encoé, D’â fond di cie s’en vïnt tot fô de raidge Le pus tèrribye des afaints Que feuche djemais v’ni d’lai sens de Méneût. L’Aîbre tïnt bon ; l’époulat piaiye, L’hoûere chôçhe touedge pus foûe Taint èt che bïn qu’è déraicene Çtu qu’aivait lai téte dains le Cie Èt les pies tchie les Tairpies. {Bernard Chapuis} ---- écouter la fable racontée par Bernard Chapuis
---- http://a133.idata.over-blog.com/4/11/16/07/Landscape/Le-chene-et-le-roseau.jpg ----

Le chêne et le roseau

{{Jean de La Fontaine}} Le Chêne un jour dit au Roseau : « Vous avez bien sujet d’accuser la Nature ; Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau. Le moindre vent, qui d’aventure Fait rider la face de l’eau, Vous oblige à baisser la tête : Cependant que mon front, au Caucase pareil, Non content d’arrêter les rayons du soleil, Brave l’effort de la tempête. Tout vous est Aquilon, tout me semble Zéphyr. Encor si vous naissiez à l’abri du feuillage Dont je couvre le voisinage, Vous n’auriez pas tant à souffrir : Je vous défendrais de l’orage ; Mais vous naissez le plus souvent Sur les humides bords des Royaumes du vent. La nature envers vous me semble bien injuste. - Votre compassion, lui répondit l’Arbuste, Part d’un bon naturel ; mais quittez ce souci. Les vents me sont moins qu’à vous redoutables. Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu’ici Contre leurs coups épouvantables Résisté sans courber le dos ; Mais attendons la fin. « Comme il disait ces mots, Du bout de l’horizon accourt avec furie Le plus terrible des enfants Que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs. L’Arbre tient bon ; le Roseau plie. Le vent redouble ses efforts, Et fait si bien qu’il déracine Celui de qui la tête au Ciel était voisine Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts.