Vous êtes ici : Accueil > Contes, nouvelles, chansons, presse, radio, films, pages d’histoire > Pages d’histoire > Personnages > Deux cent vingt-çïntie ans aiprès la moûe de Pierre Péquignat, le 30 octobre (...)
Par : Fleury LJ
Publié : 11 mai 2012

Deux cent vingt-çïntie ans aiprès la moûe de Pierre Péquignat, le 30 octobre 1965

Christiane Lapaire a retrouvé un document qui célèbre l’anniversaire de Pierre Péquignat. Qui a écrit ce texte ? Peut-être Djoset Barotchet.
Nous en publions une copie PDF, de manière à pouvoir l’imprimer ou l’agrandir.
Vous trouverez également plus bas les textes en patois et en français. Ci-dessous se trouvent l’image du texte. Un enregistrement serait bienvenu ! Merci d’avance envoi à djasans@djasans.ch ----

Dous cent vïngt-cïntye ans aiprés lai moûe de Pierra Péquignat, le 30 octôbre 1965

El ât prou malaîjîe en ïn hanne que n’é t’aivu dains lés târpes que dés yéjures d’écôle de cognâtre l’hichtoère de Pierra Péquignat. Poquoi ? Po lai sïmpye é boinne réjon que dains cés yéjures-li, cés d’mon temps d’afaint, é bïn an on rébiè de nôs en pailaie. Bïn chur è vayait bïn meu nôs aippâre lai baitaiye de Morgarten, li â moins lo saing é coulaie d’aidroit. S’i saîe ïn pô âtye de lai vîe de note Pierra, ç’ât d’aivoi ôyu nos véyes dgens djâsaie lo soi en lai lôvrèe. E m’sanne qu’i lés ôs enco raicontaie, ès lés saivïnt chi bïn lés bèlles hichtoières de tchie nos. Es lés dyïnt chi bïn qu’ès sont d’moéraie dains mai maiyeutche po n’en pu poyait r’paitchi. Co que m’faît brâment piaigi, ç’ât que Pierra Péquignat se signaît tot boinnement nian pe Pierre Péquignat, mains Pierra Péquignat. An dit que c’était lo roi dés commis d’Aidjoûe ! Po moi, èl était brâment pus qu’ïn roi, c’était ïn mârtyr. Se aivo ïn tchêne an on djemaîs poyu faire ïn peuplie, aivô lu an n’on djemaîs poyu ran faire d’âtre qu’ïn aidjôlat, ïn jurassien. El ât aivu condamnè è étre étrôssè, écâtchelè sains aivoi fait è coulaie ènne mâlhéyerouse petéte gotte de saing. Mains èl é tot béyie l’sïn, é peus craibïn qu’èl é béyie de bon tiûere, poche que tot hanne qu’aime son paiyis ne dait pe aivoi pavou d’lo béyie s’è fât. Béyie son saing sains s’étre voûedgeayie aivô çtu dés âtres, voili poquoi i n’aî pe pâvou de sôt’ni que note Pierra était ïn mârtyr……. Po moi ç’était ïn tot braîve hanne qu’é épreuvaie bïn dés annèes, de chiquaie, de raiyûe lés désaicoûes que n’aivïnt râtè de crâtre entre nos bons paiyisains d’Aidjoûe è peus Sigismond de Reinach, que n’était boussè que pai l’ordyeu…..Vos saîtes chi bïn qu’moi que l’ordyeu manne chus tos lés tch’mïns, sâf ch’lo bon, poche que l’ordyou aiveuye tos cés qu’aint ci grôs défât………. Dés creves-tiûeres, note Pierra en é t’aivu churement pus qu’è son sô lo poûere hanne. An r’vegnaint dâs Berne voù èl était allè po épreuvaie de faire è compâre lo mâ que reûjeyaie son Aidjoûe, è pairât qu’è s’était dje fait airrâtaie è Bellelay. An y foton lés tchainnes po l’aimannaie è , Porreintru. Churement que tot en tchemmenaint, ci gros tiûere d’Aidjôlat se musaie qu’en traivachaint son bé v’laidge de Cordgenay, que sés aimis veulïnt étre li po â moins y tendre lai main ! Mains niun, niun se ç’n’était dés soudaies français que f’sïnt è grulaie lés dgens. Que çoli daivait étre du po lu de se sentre aibaindenè dïnche tot d’ïn côp. El ât vraî que dains dïnche dés péssaidges, lés aimis se n’môtrant pe,ès s’éraîréchant putôt ! Coli daivait étre enco bïn pus dû li voiye de lai Tôssaint en airrivaint aivô Lion è peus Riat devaint lai mâjon d’vèlle de Porreintru, qu’était vadgeèe pai dés soudaîts étraindgies…… Béyie son saing po son paiyis, devaint lés eûyes de sés aimis que n’aint ran dit, qué creve-tiûerre més aimis !!! Po bïn môtraie yote foûeche, è peus yote saivoi vivre, lés occupaints cés rigats n’aivïnt ran trovè d’meu que d’allaie pendre lés membres de Pierra è peus de sés dous aimis en dés pôtés. E pairât qu’aiprés çoli çte rotte de bregands poyïnt r’dreumi chus yôs doûes arayes !! Sigismond aivait diaingnie, mains sains préfets, poche que lu dje en ci temps li aivait rébiè, qu’è n’sîe d’ran de laîrmaie de vadgeaie ïn paiyis aivo lai foûeche dés aîrmes n’en n’serait diaignie lo tiûere dés dgens que vétiant dains ci paiyis. Voili è pô prés tot ço qu’i saîs de Pierra Péquignat. Mains ço qu’i vôs r’commainde de tot mon tiûere, é bïn ç’ât qu’lo djo d’lai Tôssaint en allaint prayie ch’lés fôsses de vôs moûes, musaie ïn potchignat en c’t’hanne que nôs é léchie l’imaidge de lai frainthije di coraîdge de lai v’lantè chutôt.Nôs y dains bïn ènne petéte musatte ci djo li non pétes ? Se ç’était aivu ïn béche-coûene cment en an voit brâment âdjed’heû é bïn è y’é bèlle écoûenne en vélat qu’an en pailerait pus. Mains lu n’é pe aivu pavou, ran ne l’é faît è tchaindgie d’aivisaîye, èl ât aivu décapitè ran que po aivoi aimè son Aidjoûe, note Aidjoûe, son Jura note Jura, que nos vlans tit pai foûeche vadgeaîe… E n’ât Dûe moiyïn qu’â sîecle que nôs vétians, lo sîecle de lai décolonisation qu’an s’dait bïn poyait chiquaie en djâsaint. I échpére qu’è y veut bïn v’ni ïn djo que lés teûnés, lés ordyous, lés coûerétes aivô lésquéls en n’serait djâsaie en més vlant faire è bortiulaie po étre rempiaiçi pai dés hannes qu’aint di s’né è peus d’lai compregnoûere……. Po l’bïn de note Aidjoûe de note Jura tot entie, que vétieuche en nos lo seûvni de Pierra Péquignat ! S’vôs v’lèz saivoi c’ment qu’an moinnait, ( bis ) Lo paiyisain de Cordgenay, ( bis ) Et bïn botèz vos tus è boire, I vôs raiconteraî son hichtoière. Voili c’ment qu’è nôs fât faire tus ( bis ) Fotre és tyrans lai pâle â tiu ( bis ) Tiaind ç’ât qu’nôs airains lai victoière C’ment Petignat nôs porains boire. ---- Deux cent vingt-cinq ans après la mort de Pierre Péquignat, le 30 octobre 1965 Il est assez difficile pour un homme qui n’a eu dans les mains que des lectures d’école de connaître l’histoire de Pierre Péquignat. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que dans ces lectures-là, celles de mon temps d’enfance, et bien on a oublié de nous en parler. Bien sûr il valait bien mieux nous apprendre la bataille de Morgarten, là au moins le sang a coulé comme il faut. Si je sais un peu quelque chose de la vie de notre Pierra, c’est d’avoir entendu nos vieilles personnes en parler le soir à la veillée. Il me semble que je les entends encore raconter, ils les savaient si bien les belles histoires de chez nous. Ils les racontaient si bien qu’elles sont entrées dans ma tête pour n’en plus pouvoir repartir. Ce qui me fait surtout plaisir, c’est que Pierra Péquignat ne signait pas Pierre Péquignat mais Pierra Péquignat. On dit que c’était le roi des commis d’Ajoie ! Pour moi, il était beaucoup plus qu’un roi, c’était un martyr. Si avec un chêne on n’a jamais pu faire un peuplier, avec lui on a jamais rien pu faire d’autre qu’un ajoulot, un jurassien. Il a été condamné à être découpé, écartelé sans avoir fait couler une malheureuse petite goutte de sang. Mais il a tout donné le sien, et sûrement qu’il l’a donné de bon coeur, parce que tout homme qui aime son pays ne doit pas avoir peur de le donner s’il faut. Donner son sang sans s’être battu avec celui des autres, voilà pourquoi je n’ai pas peur de soutenir que notre Pierra était un martyr…. Pour moi c’était un tout brave homme qui a essayé bien des années, d’arranger, de régler les désaccords qui n’avaient cessé de grandir entre nos bons paysans d’Ajoie et Sigismond de Reinach, qui n’étaient poussés que par l’orgueil….. Vous savez aussi bien que moi que l’orgueil mène sur tous les chemins, sauf sur le bon, parce que l’orgueil aveugle tous ceux qui ont ce grand défaut…. Des crève-cœurs, notre Pierra en a eu sûrement plus qu’à son tour le pauvre homme. En revenant de Berne où il était allé pour faire comprendre le mal qui rongeait son Ajoie, il paraît qu’il s’était déjà fait arrêter à Bellelay. On y mettait les chaînes pour l’amener à Porrentruy. Sûrement que chemin faisant, ce gros cœur d’Ajoulot, pensait qu’en traversant son beau village de Courgenay, que ses amis voulaient être là pour au moins lui tendre la main ! Mais personne, personne si ce n’étaient des soldats français qui faisaient peur aux gens. Que cela devait être dur pour lui de se sentir abandonné comme ça tout d’un coup. Il est vrai que dans de tels passages les amis ne se montrent pas, ils se font plutôt plus rares. Cela devait être encore bien plus dur la veille de la Toussaint en arrivant avec Lion et Riat devant l’Hôtel de Ville de Porrentruy qui était gardé par des soldats étrangers…… Donner son sang pour son pays, devant les yeux de ses amis qui n’ont rien dit, quel crève-cœur mes amis !! Pour bien montrer leur force et pour leur savoir-vivre, les occupants ces bourreaux n’avaient rien trouvés de mieux que d’aller pendre les membres de Pierra et de ses deux amis à des poteaux. Il paraît qu’après ça cet attroupement de brigands pouvait dormir sur ces deux oreilles ! Sigismond avait gagné, mais sans préfets, parce que lui déjà à ce temps- là avait oublié, qu’il ne sert rien de piller, de garder un pays avec la force des armes on ne peut pas gagner le cœur des gens qui vivent dans ce pays. Voilà à peu près tout ce que je sais de Pierra Péquignat. Mais ce que je vous recommande de tout mon cœur, et bien c’est que le jour de la Toussaint en allant prier sur les tombes de vos morts, pensez un peu à cet homme qui nous a laissé l’image de la franchise, du courage et surtout de la volonté. Nous y devons bien une petite pensée ce jour- là vous ne croyez pas ? Si ça avait été un sournois comme on en voit beaucoup aujourd’hui et bien il y a belle lurette qu’on n’en parlerait plus. Mais lui n’a pas eu peur, rien ne lui a fait changer d’avis, il a été décapité rien que pour avoir aimé son Ajoie, notre Ajoie, son Jura, notre Jura, que nous voulons garder de toutes nos forces….. Il n’y a pas moyen qu’au siècle qu’on vit, le siècle de la décolonisation qu’on doit bien pouvoir s’arranger en discutant. J’espère qu’il va bien venir un jour où les imbéciles, les orgueilleux avec lesquels on ne peut pas parler vont se faire bousculer pour être remplacés par des hommes qui ont du flair et de la compréhension….. Pour le bien de notre Ajoie, de notre Jura tout entier, que vive en nous le souvenir de Pierra Péquignat. Si vous voulez savoir comme on menait (bis) Le paysan de Courgenay (bis) Et bien mettez-vous tous à boire Je vous raconterai cette histoire Voilà comme il nous faut faire tous (bis) Foutre au tyran la pelle au cul (bis) Quand est-ce que nous aurons la victoire ? Comme Petignat nous pourrons boire ---- La chanson des Petignats