Publié : 25 novembre 2022

Les bonnes manières

Les boénnes mainieres

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 25 novembre 2022

Les boénnes mainieres

Po s’ ménaidgie les boénnes grâces di Cie, lai dévote Fidélia ne mainque âtiune occâjion de faire ïn chrôma â tiurie. « Ç’ n’ât ran. Djeute ènne petète aittention. » Ḕs boétchoéyant ? Di boudïn po l’ tiurie. Èlle fait ènne foénèe ? Ènne mitchatte po l’ tiurie. Ç’ât le p’tèt Louyis qu’ât tchairdgi d’aippoétchaie ces chrômas en lai tiure. Tchéque côp è soénne, aittend qu’an yi euvreuche, èt dit cment sai mére yi é aippris : -Bondjoué, Mossieû l’ Tiurie. Voili des chtriflattes que mai mére vôs envie. -Méchi, mon petèt. T’eurméchierés bïn tai manman. -Bondjoué, Mossieû l’ Tiurie. Voili di laid que mai mére vôs envie. -Méchi, mon petèt. T’eurméchierés bïn tai manman. -Bondjoué, Mossieû l’ Tiurie. Voili d’ lai salaidge que mai mére vôs envie. -Méchi, mon petèt. T’eurméchierés bïn tai manman. Ïn djoué, le p’tèt Louyis entre sains soénnaie, s’embrûe dains l’ cab’bnèt d’ traivail di tiurie, poje ïn potat d’ beurre ch’ le bureau èt détâle. Le chire le raippele aich’tôt . -Halte, mon p’tèt l’aimi. Ne t’ sâve pe dïnche. I t’ veus aippâre lai politèsse. Siete-te li en mai tâle. T’ès le tiurie. Moi i seus le p’tèt Louyis. I soénne. Te m’euvres. Moi qui seus bïn éy’vè, i dis : « Bon djoué, Mossieû l’ Tiurie. Voili di beurre que mai mére vôs envie. » Le p’tèt Louyis s’yeuve, fait les mïnnes de chneuquaie dains sai sotanne en dyaint : -Méchi, mon petèt. T’eurméchierés bïn tai manman. Tïns, voili quait’ sôs po lai commichion. Note s’embrûe, pénètre brusquement ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Les bonnes manières

Pour se ménager les bonnes grâce du Ciel, Fidélia la dévote ne manque aucune occasion de faire un cadeau au curé. « Ce n’est rien. Juste une petite attention. » Ils bouchoient ? Du boudin pour le curé. Elle cuit une fournée ? Une michette pour le curé. C’est le petit Louis qui est chargé d’apporter ces cadeaux à la cure. Chaque fois, il sonne, il attend qu’on lui ouvre, et dit comme sa mère lui a appris : -Bonjour, Monsieur le Curé. Voilà des chtriflattes que ma mère vous envoie. -Merci, mon petit. Tu remercieras bien ta maman. -Bonjour, Monsieur le Curé. Voilà du lard que ma mère vous envoie. -Merci, mon petit. Tu remercieras bien ta maman. -Bonjour, Monsieur le Curé. Voilà de la salade que mai mère vous envoie. -Merci, mon petit. Tu remercieras bien ta maman. Un jour, le petit Louis entre sans sonner, se précipite dans le cabinet de travail du curé, pose un petit pot de beurre sur le bureau et détale. L’abbé le rappelle aussitôt. -Halte, mon petit ami. Ne te sauve pas comme ça. Je veux t’apprendre la politesse. Assieds-toi là à ma table. Tu es le curé. Moi je suis le petit Louis. Je sonne. Tu m’ouvres. Moi qui suis bien élevé, je dis : « Bonjour, Monsieur le Curé. Voilà du beurre que ma mère vous envoie. » Le petit Louis se lève, fait les mines de chercher dans sa soutane en disant : -Merci, mon petit. Tu remercieras bien ta maman. Tiens, voilà quatre sous pour la commission. { {{Les chroniques patoises de Bernard Chapuis en 2022}} } {{ {Toutes les chroniques patoises de Bernard Chapuis} }}