Publié : 3 janvier 2023

Le cou du poulet

L’ cô di poulat

L’ cô di poulat

Tiaind qu’ i étôs boûebat, tchie nos c’était c’ment dains lai pupaît des faimiyes. Di poulat è maindgie, é n’y en aivait qu’les djoués d’ fétes obïn d’ temps è âtre l’ duemoine. C’était quasi ènne nonne de yuchque. Quéques côps, en dyije de voulaîye chu lai tâle, nos aivïns ènne d’ cés véyes dg’rainne qu’ n’oûevait pus èt pe qu’è fayait tieûre duraint des hoûeres. L’énèrdgie po lai tieûre était pus côtouse qu’ lai béte ! Mains çoli bèyait ïn bon brue èt pe d’ lai boénne tchie è maindgie en biaintche sâce d’aivô di riz obïn d’ lai purèe d’ pomattes, qu’an aippelait, des stocks. Nos aimïns bïn çoli, c’était brâment bon. Poi contre, po l’djoué not’ féte, not’ manman nos d’maindait ç’ que nos vlïns po lai nonne d’ médi. Po mon frére, au mois d’ nôveimbre, c’était di boudïn d’aivô des coénattes èt pe d’ lai purèe d’ pammes dâli qu’ moi i d’maindôs di poulat ! È pe i vos peus dire qu’ ci poulat n’était p’ ïn poulat d’ïn gros maigaisïn, mains ïn poulat qu’airrivait tot drèt d’ènne fèrme. Lai manman l’aippontait d’aivô aimoué èt tieusain, en l’aisséj’naint d’aivô des herbattes. Sai pée était doérè èt croquainnes, sai tchie était tare èt fonjainne. Tote lai faimiye s’régâlait. C’était vrâment ènne féte. Mais mon moiyou seuvni d’ ci môment-li c’était qu’ duraint tote lai mait’nèe i musôs dje â piaiji d’ ci régâ. Lai féte ècmençait dje chu mon bainc d’écôle. Mains ç’ qu’ i aimôs encoé l’ meu, c’ était qu’ tiaind qu’i rev’niôs d’ l’ écôle mai manman m’aivait botè d’ènne sen l’ cô di poulat tot bïn gréjyie è reûdgyie. Nos n’étïns encoé qu’ les dous dains lai tieûjainne dvaint lai nonne de médi, moi è m’ déyètaie d’ ci tot sïmpye moéché d’ poulat èt pe lé è churvoiyie lai fïn d’ lai tieûchon d’ lai voulaîye. Ïn gros bac v’niait encoé poi li-d’chus po mai féte. Quèlle boussèe d’ boénhéye ! Çoli âchi ç’ât d’ lai gaichtrâloitch’rie !

Le cou du poulet

Lorsque j’était enfant, chez nous c’était comme dans la plupart des familles. Du poulet à manger, il n’y en avait que les jours de fête ou bien de temps à autre le dimanche. C’était quasi un repas de luxe. Quelques fois, en guise de volaille sur la table, nous avions une de ces vieilles poules ne pondant plus et qu’il fallait cuire durant des heures. L’énergie pour la cuire était plus couteuse que la bête ! Mais cela donnait un bon bouillon et de la bonne chair à manger en sauce blanche avec du riz ou de la purée de pommes-de-terre qu’on appelait, des stocks. Nous aimions bien ça, c’était délicieux. Par contre, pour le jour de notre anniversaire, notre maman nous demandait ce que nous voulions pour le repas de midi. Pour mon frère, au mois de novembre, c’était du boudin avec des cornettes et de la purée de pommes alors que moi je demandais du poulet. Et je peux vous dire que ce poulet n’était pas un poulet d’un grand magasin, mais un poulet qui arrivait directement d’une ferme. La maman le préparait avec amour et soin en l’assaisonnant avec des herbettes. Sa peau était dorée et croustillante, sa chair était tendre et fondante. Toute la famille se régalait. Mais mon meilleur souvenir de ce moment-là, c’était que durant toute la matinée je pensais déjà au plaisir de ce festin. La fête commençait déjà sur mon banc d’école. Mais ce que j’aimais encore le mieux, c’était que lorsque je revenais de l’école ma maman m’avait mis de côté le cou du poulet tout bien grillé à ronger. Nous n’étions encore que les deux dans la cuisine avant le repas de midi, moi à me régaler de ce tout simple morceau de poulet et elle à surveiller la fin de la cuisson de la volaille. Un gros baiser venait encore par là-dessus pour mon anniversaire. Quel moment de bonheur. Ça aussi c’est de la gastronomie ! {Ènne tieûche de poulat bïn gréjyie, qué régâ !} Une cuisse de poulet bien grillée, quel régal !