Publié : 12 mai 2023

Le jeu de l’amour

Le djûe d’ l’aimoé

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 12 mai 2023

Le djûe d’ l’aimoé

 Roudi, le dottoé yi é dit qu’è d’vait mairtchi tos les djoués. Aiprés l’ dénèe, è fait son p’tèt sanne, è prend sai cainne èt vait djuqu’â care di bôs. È peut d’moéraie ènne hoûere chu ci bainc à raivoétaie le v’laidge de son afaince en musaint ch’ lai vétyaince èt lai moûe. Çte vâprèe-li, son bainc ât dj’ottyupè poi ïn coupye de djûenes aimoérous. « Sietèz-vôs pie ! que dit lai baîchatte â véye Roudi. Nôs se v’lans sarraie. È y é prou d’ piaice po nôs trâs. » Di coin d’l’eûye, Le Roudi cheut yote djûe d’aimoé èt ne pie ran di chpèctâtye. Lai baîchatte â boûebe : - Mai drète aroiye me fait mâ. Le boûebe lai béje tendrement chus çt’aroiye èt d’mainde : - Ât-ce que çoli vait meus mit’naint ? - Ç’ât r’voiri. Mit’naint ç’ât lai gâtche airoiye. Le boûebe lai béje tendrement chus lai gâtche airoiye. - Çoli t’ fait di bïn ? - Ô, i n’ sens pus ran. Mains mit’naint, ç’ât l’épâle. Le Roudi qu’ât tot émaiyi : « Cment qu’i vôs envie. Qu’i voérrôs étre djûene â djouè d’adj’d’heû. Mai fanne, tiaind qu’i veus lai chmoutsaie, èlle me dit : Râte, Roudi, te m’ fais mâ. Ou bïn : Pe mit’naint, i aî di traivail. Ou bïn encoé : Pe d’vaint les afaints. I n’dirai pus : C’était meus ci en-d’vaint. »  ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Le jeu de l’amour Le docteur conseillé à Roudi de marcher tous les jours. Après dîner, il fait sa petite sieste, il prend sa canne et va jusqu’au coin de la forêt. Il peut rester une heure sur son banc à regarder le village de son enfance en méditant sur la vieillesse et la mort.

Cet après-midi-là, son banc est déjà occupé par un couple de jeunes amoureux. « Asseyez-vous donc ! dit la fille au vieil homme. Nous nous serrerons. Il y a assez de place pour nous trois. » Du coin de l’œil, Roudi suit leur jeu d’amour et ne perd rien du spectacle. La jeune fille au garçon : - Mon oreille droite me fait mal. Le jeune homme dépose un tendre baiser sur cette oreille et demande : - Ça va mieux maintenant ? - C’est passé. Maintenant c’est l’oreille gauche. L’amoureux la baise tendrement sur l’oreille gauche. - Ça t’a fait du bien ? - Oui, je ne sens plus rien. Mais à présent c’est l’épaule. Roudi tout émoustillé : « Comme je vous envie. Et que je voudrais être jeune de nos jours. Ma femme, quand je cherche à l’embrasser, elle me dit : Arrête, Roudi, tu me fais mal. Ou bien : Pas maintenant, j’ai du travail. Ou bien encore : Pas devant les enfants. Je ne dirai plus : C’était mieux avant. » { {{Les chroniques patoises de Bernard Chapuis en 2022- 23}} } {{ {Toutes les chroniques patoises de Bernard Chapuis} }}