Publié dans le Quotidien Jurassien le 27 juin 2025
Pasteur et seingne de croux
Les fidèyes d’ lai bairoitche réformèe s’ faint di tieusain. Ât-ce que note pasteur ne s’rait p’en train de virie caitholitçhe ? Ès l’ voyant s’vent faire le seingne de croux. Tiaind qu’è tyitte ènne aissembyèe, tiaind qu’è soûe di tempye, tiaind què paît d’ènne faimille laivoù qu’èl ât aivu invitè, tiaind qu’è soûe d’ sai dyïmbarde, èt meinme des côps dains lai rue. Le cevré, l’embreuye, lai gâtche épâle. Qu’ât-ce que ç’ât qu’ ces mainieres ? È fât djâsaie d’aivô lu. -Vai-y, toi ! - Nian. Vai-y putôt toi, te l’ coégnâs meus qu’ moi. Dâli des dichcuchions è n’en pus fini.
Jean-Paul, le présideint d’ bairoitche é pris son coéraidge è dous mains, èl é soénnaie en lai tiure. Ç’ât lai fanne di pasteur que yi é euvri. « Entrèz pie â poiye, i vais tçhri mon hanne. »
Qu’ât-ce que s’ pésse, Jean-Paul ? demainde le pasteur. È y é ïn probyème ?
Ci poûere Jean-Paul était dgeinnè, è bèrboéyait, è s’ tortoéyait chu sai sèlle :
Eh bïn voili, vos fidèyes vôs voyant s’vent faire le seingne de croux. Ès aint pavou que vôs vireuchïns caitholitçhe.
Le pasteur ât paitchi d’ïn grant écâçhèt :
Qu’ès n’ se f’seuchïnt pus d’ tieusain. I seus ïn bé l’évéji. Èt peus i prove aidé s’i n’aî ran rébyè. Mes breliçhes (ch’ le cevré), mai braigatte (s’èlle ât bïn frome), mai boéchatte (dôs lai gâtche épâle), mes câtches de crédit (dôs lai drète épâle).
Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis
Pasteur et signe de croix
Les fidèles de la paroisse réformée se font du souci. Est-ce que notre pasteur ne serait pas en train de se convertir au catholicisme ? Ils le voient souvent faire le signe de croix. Quand il quitte une réunion, quand il sort du temple, quand il part d’une famille qui l’a invité, quand il sort de sa voiture, et même parfois dans la rue. Le front, le nombril, l’épaule gauche. Qu’est-ce que c’est que ces manières ? Il faut lui parler. -Vas-y, toi ! - Non. Vas-y toi, c’est, mieux, tu le connais mieux que moi. S’ensuivent des palabres à n’en plus finir.
Jean-Paul, le président de paroisse, a pris son courage à deux mains, il a sonné à la cure. C’est la femme du pasteur qui lui a ouvert. « Entrez donc au salon, je vais chercher mon mari. »
Qu’est-ce qui se passe, Jean-Paul ? demande le pasteur. Il y a un problème ?
Ce pauvre Jean-Paul était gêné, il bredouillait, il se tortillait sur sa chaise :
Eh bien voilà, vos fidèles vous voient souvent faire le signe de croix. Ils craignent que vous ne deveniez catholique.
Le pasteur est parti d’un grand éclat de rire :
Qu’ils ne se fassent aucun souci. Je suis un grand étourdi. Je contrôle toujours si je n’ai rien oublié. Mes lunettes sur le front, ma braguette (est-elle bien fermée), ma bourse (sous l’épaule gauche), mes cartes de crédit (sous l’épaule droite).
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