Publié : 9 décembre 2022

Molière, Harpagon ne retrouve plus sa cassette

Molière, Harpagon ne r’trove pus sai tyaissatte

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 9 décembre 2022 Molière en patois

Harpagon ne r’trove pus sai tyaissatte

 laire !  laire !  l’aissaichïn !  meûrtrie ! Djeûtiche, djeûte Cie ! I seus predju, i seus aissaichinè, an m’ont copè lai goûerdge, an m’ont déreubè mon airdgent. Tiu qu’ çoli peut étre ? Qu’ât-ce qu’èl ât d’veni ? Laivou ât-ce qu’èl ât ? Laivou ât-ce qu’è s’ caitche ? Qu’ât-ce qu’i veus faire po l’eurtrovaie ? Laivou ritaie ? Laivou ne pe ritaie ? Ât-ce qu’è n’ât p’ li ? Ât-ce qu’è n’ât p’ ci ? Tiu ât-ce ? Râte ! Eurbèye-me mon airdgent, aivouitre ! (È s’ prend lu-meinme le brais.) Ah ! Ç’ât moi. Mon échprit ât troubyè, èt peus i n’ sais p’ laivou qu’i seus èt ç’ qu’i fais. Las-moi ! Mon poûere airdgent, mon poûere airdgent, mon tchier aimi ! An m’ont savrè de toi ; èt peus, poéche que te m’és t’aivu enyevè, i aî predju mon sôtïn, mon élâdg’ment, mai djoûe ; tot ât fini po moi, èt peus i n’aî pus ran è faire chu çte bôle ! Sains toi, è m’ât impossibye de vivre. Ç’ât fotu, i n’en peus pus ; i raincaye, i seus moûe, i seus entèrrè. È n’y é niun que v’leuche me réchuchitaie en me r’bèyaint mon tchier airdgent, o bïn en m’aippregnaint tiu qu’ l’é pris ? Euh ? Qu’ât-ce qu’ vôs dites ? Ç’ n’ât niun. Tiu qu’ ce feuche qu’é fait l’ côp, è fât qu’aivô brament de tieusain èl euche dyèttè l’hoûere, èt peus èl é djeut’ment tchoiji le môment qu’i djâsôs d’aivô mon djedayou d’ boûebe. Feu d’ ci ! I m’en veus allaie tçheri lai dieûchtiche èt borriâdaie tote mai maison : diaîchattes, vâlats, boûebes, baîchattes, èt peus moi aich’ bïn. Notes Aivouitre, coquin mon élâdg’ment, ma consolation i raincaye, je me meurs ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis
Molière en patois

Harpagon ne retrouve plus sa cassette

Au voleur ! au voleur ! à l’assassin ! au meurtrier ! Justice, juste Ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné, on m’a coupé la gorge, on m’a dérobé mon argent. Qui peut-ce être ? Qu’est-il devenu ? Où est-il ? Où se cache-t-il ? Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir ? N’est-il point là ? N’est-il point ici ? Qui est-ce ? Arrête ! Rends-moi mon argent, coquin ! (Il se prend lui-même le bras.) Ah ! c’est moi. Mon esprit est troublé, et j’ignore où je suis, et ce que je fais. Hélas ! mon pauvre argent, mon pauvre argent, mon cher ami ! On m’a privé de toi ; et puisque tu m’es enlevé, j’ai perdu mon support, ma consolation, ma joie ; tout est fini pour moi, et je n’ai plus que faire au monde ! Sans toi, il m’est impossible de vivre. C’en est fait, je n’en puis plus ; je me meurs, je suis mort, je suis enterré. N’y a-t-il personne qui veuille me ressusciter, en me rendant mon cher argent, ou en m’apprenant qui l’a pris ? Euh ? que dites-vous ? Ce n’est personne. Il faut, qui que ce soit qui ait fait le coup, qu’avec beaucoup de soin on ait épié l’heure ; et l’on a choisi justement le temps que je parlais à mon traître de fils. Sortons ! Je veux aller quérir la justice et faire donner la question à toute ma maison : à servantes, à valets, à fils, à fille, et à moi aussi { {{Les chroniques patoises de Bernard Chapuis en 2022}} } {{ {Toutes les chroniques patoises de Bernard Chapuis} }}