Par : Fleury LJ
Publié : 17 août 2009

Le pèlerinage

Le vyaidge, Marie-Louise Oberli

La Babouératte, la Coccinelle

Ecouter le patois
Le vyaidge, Marie-Louise Oberli

Le vyaidge

Les haibitaints des Roudges-Térres, petét haimé de paiyisains se rendaïnt tchéque an-nèe â mois de mai en Note-Daime-de-lai-Pîere. Le dépiyaicement se faisait aivô le train è brussou. Ce n’était pon ïn voiyaidge de pyésaince, mains ïn vyaidge po demaindaie en lai Vîerdge Mairie d’aiccouédjaie sai protéction su les dgens, les bétes di yûe. Ç’ât ène ancïnne côtume dont l’ouridgine se péd dains lai neût des temps. Les paiyisains vétchant aidé aivô lai djinguéye qu’ène chouinguèe de grâle rûene les môssons. De vétche en lai mésure des sésons, di temps, ces dgens de lai térre aivaïnt ïn devoi de recognéchaince envés lai Mére de Dûe. Voilì poquoi ès se rendaïnt è Mariastein â bontemps, ène dgens pai ménaidge. Paitchis le maitïn, ès rentraïnt le djé d’aiprés sains rébyaie de raippouétchaie des mouterlattes en ces qu’étaïnt demouérès en l’hôtâ. Lai Léonie pe lai Bertha n’étaïnt djemais paitchis bïn feûs de l’hôtâ, èlles ne djâsaïnt que le patois. Â retoué di vyaidge, staie dains ïn wagon di tchmïn de fée, côte lai fnétre, èlles baidgelaïnt de tot pe de ren. Le train s’airrâte è Soyhières, djeûte devaint les tchoûeres de lai gare. Lai Léonie se yeûve po beûyie en lai fnétre tchainque lai Bertha y demainde : - Léonie, voùé que nos son ? - Nos son è Damen, Bertha ! Le vyaidge de ces doux véyes daimes, ç’ât péssè è y aî bïn des an-nèes. Èl ât demouérè dains lai mémoûere des haibitaints di haimé, aichebïn que lai côtume di vyaidge â bontemps. Lai Babouératte mai 2009 ----

Le pèlerinage

Les habitants des Rouges-Terres, petit hameau de paysans, se rendaient chaque année, toujours au mois de mai à Notre-Dame-de-la-Pierre. Le déplacement se faisait avec le train à vapeur. Ce n’était pas un voyage de plaisance, mais un pèlerinage pour demander à la Vierge Marie d’accorder sa protection sur les gens, le bétail du lieu. C’est une ancienne coutume dont l’origine se perd dans la nuit des temps. Les paysans vivent toujours avec la crainte qu’une averse de grêle ruine les moissons. De vivre au rythme des saisons, du temps, ces gens de la terre avaient un devoir de reconnaissance envers la Mère de Dieu. Voilà pourquoi ils se rendaient à Mariastein au printemps, une personne par ménage. Partis le matin, ils rentraient le jour d’après sans oublier de rapporter des mouterlattes à ceux qui étaient restés à la maison. La Léonie et la Bertha n’étaient jamais parties bien loin de la maison, et ne parlaient que le patois. Au retour de pèlerinage, assises dans un wagon du chemin de fer, près de la fenêtre, elles bavardaient de tout et de rien. Le train s’arrête à Soyhières, juste devant les toilettes de la gare. La Léonie se lève pour guigner à la fenêtre lorsque la Bertha lui demande : - Léonie, où sommes-nous ? - Nous sommes à Damen, Bertha ! Le pèlerinage de ces deux vieilles dames, c’est passé il y a bien des années. Il est demeuré vivant dans la mémoire des habitants du hameau, aussi bien que la coutume du pèlerinage au printemps. La Coccinelle mai 2009