Les Blue-Jeans
La Babouératte, la Coccinelle
Un regard sur notre époque et ses déguisements par Marie-Louise Oberli Wermeille
Les Blue-Jeans
Lai Lisa reciôsé lai feûye di djoué qu’élle yésait, pe se reboté è rémeûdre lai mairtchâle de sai machine è codre. Voilì ène bouènne boussiatte qu’élle eurvîre lai tchulatte de son boûebe. Aidjustaie ïn tacon, ai po prés de lai meînme môlure po coitchie ïn ptchu, n’ât pon se aîsie. Quée tchude de fôe ! Grïmpaie és aibres po dénitchie les ûes de crâs, mains sutot aivô ïn blue-jeans tot neu. Ces djûenes, quée saintè ès int, djâse-t-élle tot hât. Ç’ât en ci moment-lì que s’aimouéne lai Djulie, ène vésïne :
-Qu’és-te lai Lisa ? Te djâse tote pair toi mitnaint ?
-Aîye… nyan, y m’engraingne aivô ces tchulattes, quée môde ! Y ne trove pon de tacons de lai meînme môlure po retacouénnaie ces blue-jeans. Muse ïn po ; c’était le premie côp qu’è botait ci jeans. Aivô ton boûebe, ès ne fint que des aîneries ces doux tchèrvôtes.
-Poquoi t’engraingnie de lai sôtche po ène tchulatte, obïn putôt po ïn ptchu ? È fât bïn que djûenâsse se pésse, lai Lisa ! Po ècmencie, te dairais révisaie les euffres de vétures. Diaîle ! Nos en rcians prou. Les boûetes és lattres regoûessant d’euffres totes moiyouse mairtchie les ènes que les âtres ! Te peux meînme aitchetaie des tchulattes qu’int dje les ptchus ! Ç’ât les soldes, tot ât è moitie prie… qu’ès diant !
-Te sais Djulie, moi y ne yé ren de totes ces réclames. Elles paichant tutes, su-le-tchaimp â pnie.
-Mains, po en rveni en tes blue-jeans, en tai pyaice y s’y codrôs ïn tacon oraindge. Su lai môlure gris-byeûve di jeans, le côp d’eûye srais di touainnère ! Mai bouènne Lisa, ç’ât â got di djoué, les djûenes ès ainmant çoli tot pyein. È pe moi, y trove ces môlures pataintes pus djôlies que le noi des an-nèes péssèes. Pyaque de t’étchâdaie lai misse. Te fairais meux de m’euffri ïn bon caflat. Nos djâserains des élections tyeummnâs, ç’ât pus louchtic !
Lai Babouératte
Les Blue-Jeans
Elisa referma le journal du jour qu’elle lisait, et se remit à actionner la pédale de sa machine à coudre. Voilà un bon moment qu’elle retourne le pantalon de son garçon. Ajuster un morceau de tissu à peu près de la même couleur pour cacher un trou, n’est pas facile. Quelle extravagance de fou ! Grimper aux arbres pour dénicher les oeufs de corbeaux, mais surtout avec un blue-jeans tout neuf. Ces jeunes, quelle santé ils ont, parle-t-elle tout haut. C’est à ce moment-là qu’arrive la Julie, une voisine.
-Qu’as-tu Elisa ? Tu parles toute seul maintenant ?
-Oui… non, je me fâche avec ces culottes, quelle mode ! Je ne trouve pas de pièce de tissu de la même couleur pour raccommoder ces blue-jeans. Pense un peu ; c’était la première fois qu’il mettait ce jeans. Avec ton garçon, ils ne font que des âneries ces deux roublards.
-Pourquoi te fâcher de la sorte pour une culotte, ou plutôt pour un trou ? Il faut bien que jeunesse se passe, Elisa ! Pour commencer, tu devrais regarder les offres d’habits. Diable ! Nous en recevons assez. Les boîtes à lettres regorgent d’offres toutes meilleure marché les unes que les autres ! Tu peux même acheter des culottes qui ont déjà les trous ! C’est les soldes, tout est à moitié prix … qu’ils disent !
-Tu sais Julie, moi je ne lis rien de toutes ces réclames. Elles partent toutes, sur-le-champs au panier.
-Mais, pour en revenir à tes blue-jeans, à ta place j’y coudrais un morceau de tissu orange. Sur la couleur gris-bleu du jeans, le coup d’œil sera du tonnerre ! Ma bonne Elisa, c’est au goût du jour, les jeunes ils aiment ça énormément. Et puis moi, je trouve ces couleurs pétantes plus jolies que le noir des années passées. Cesse de te fouler la rate. Tu ferais mieux de m’offrir un bon café. Nous parlerons des élections communales, c’est plus rigolo !
La Coccinelle