Paru dans
LQJ du 24 avril 2015
Grôchier’tès
Lai Fifine n’en peut pus d’oûyi Fernand, son bouebe de chés ans, dire des voûedg’ries . «
Vai tchiere
! Coéne m’â tiu.
» Le pére ne dit ran. Èl en dit âchi, èt peus des pus grôsses. «
T’és oûyi, Mére
? Le pére que répairait l’traicteur, él é dit : yé bïn mitnaint, i seus bïn emmerdè. Èt peus èl é dit ïn tchaiplat de saicrés noms de dûe.
»
- Râte
! Ton pére ç’n’ât p’ïn exempye.
Laivoù que nos afaints aippregnant ces croûyes mots
? Tot chu dains lai coué d’l’écôle d’avô les âtres. Èt voili que le ptét s’y bote âchi. È fât corridgie ces nitious tot comptant. Mains cment
? È n’sied ran d’les mnaicie, les peuni, les triquaie. Ç’ât les grôs qu’è fârait peuni, le pére en premie.
Ci Fernand rentre de l’écôle.
- Ç’ât bïn allè adjd’heû, t’és bïn traivaillie
?
- Aye, lai maîtrasse nôs é aippris ïn gros mot.
- De quoi
? È n’manquait pus qu’çoli
! Lai régente vôs aipprend des gros mots mit’naint
?
- Èlle é dit que çtu-li, ç’ât l’pus grôs de tus, qu’è n’y en é pe d’pus grôs.
- T’n’és p’ fâte de l’ répétaie, chutot d’vaint ton frérat.
- Mains çtu-li, an oûje le dire.
- Dis voûere
! fait l’pére, lai mére ne veut p’te granmoénaie.
- Anticonstitutionnellement.
- I n’l’aî dj’mais oûeyi, dit lai mére.
- Ci grôs mot-li, i n’veus dj’mais l’eurteni, dit l’frérat. Èl ’ât bïn trop grôs..
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Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Gros mots
Joséphine n’en peut plus d’entendre Fernand, son garçon de six ans, débiter des obscénités. «
Va chier
! Corne-moi au cul
!
» Le père ne dit rien. Il en dit aussi, et de plus grosses. «
Tu as entendu, Maman
? Papa, qui réparait le tracteur, a dit : eh bien, maintenant, je suis bien emmerdé. Et puis il dit un chapelet de jurons.
»
-- Cesse
! Ton père n’est pas un exemple.
Où donc nos enfants apprennent-ils ces vilains mots
? Sans doute dans la cour d’école avec les autres. Et voilà que le petit s’y met aussi. Il faut corriger ces gamins sans tarder. Mais comment
? Il ne sert à rien de les menacer, de les punir, de les frapper. Ce sont les adultes qu’il faudrait punir, le père en tout premier.
Fernand rentre de l’école.
-- C’est bien allé aujourd’hui, tu as bien travaillé
?
-- Oui, la maîtresse nous a appris un gros mot.
-- Quoi
? Il ne manquait plus que ça
! L’institutrice vous apprend des gros mots maintenant
?
-- Elle a dit que celui-là, c’est le plus gros de tous, qu’il n’y en a pas de plus gros.
-- Tu n’as pas besoin de le répéter, surtout devant ton petit frère.
-- Mais celui-là, on ose le dire.
-- Dis-le donc, fait le père, Maman ne va pas te gronder.
-- Anticonstitutionnellement.
-- Je ne l’ai jamais entendu, dit la mère.
-- Ce gros mot-là, je ne vais jamais le retenir, dit le petit frère. Il est bien trop gros
!
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