D’lai sen de tchie les Taivains
Lai bairoitche des Pomm’rats feut orinè en 1783. Èlle ât lai pus djuene des Fraintches-Montaignes. Son môtie, dédiè ès sïnts Piere è Paul feut inaudyurè en 1786. Dâli ç’ât l’drie môtie qu’ât aivu conchtru chu le Hât-Piaité. Poquoi ât-c’ qu’i vôs djâse di môtie des Pomm’rats
? È bïn ç’ât poch’que lai p’téte hichtoire qu’i vôs veus raicontaie ècmence li è pe qu’i ainme bïn ci v’laidge è pe ses ailentoués. Mains bïn chur qu’çoli s’poérait péssaie âtrepaît, n’ïmpoûetche laivou. Aidonc, c’ment qu’an l’dit dains les yivres, tote r’sannaince d’aivô ènne coégnu dgen dait étre écarquéyi.
Voili
! È y aivait ènne fois ïn djûene tiurie que v’niait d’étre nammè és Pomm’rats. L’ permie dûemoéne qu’è fsé son prâtche, l’môtie était pien c’ment ïn ûe. Çoli n’ c’était p’ vu dâ bïn grand
! Bïn chur, les bairoitchous v’lïnt voûere, è pe chutôt oyi, ci nôvé préte. An diait â v’laidge qu’ ci tiurie-li était ïn bon vétçhiaint, ïn échpicuryïn.
Di hât d’ lai tchoiyiere d’ci môtie, è fsé fait ïn tot bé prâtche. Ïn prâtche qu’ é bïn piaiju en ses nôvés bairoitchous. È djâsé des fâtes è en pairtitiulie d’ lai fâte de loitch’rie. È dié qu’ po lu lai loitch’rie ç’ n’en était p’ vrâment yun di môment quèl aippouetchait di piaiji sains faire d’ mâ en niun. Vôs s’musèz bïn qu’ ci prâtche piaijé bïn en lai pupaît des Taivains qu’ étïnt li, chutôt qu’ an aippreutchait d’ lai Sïnt-Maitchïn
!
En lai soûetchie d’ lai mâsse èl envèllé les dgens en lai tiure po yos euffi l’ aipéro è pe po les meu coégnâtre. En lai d’mé des yènne, tchétiun r’paitché en l’hôtâ è pe, po aigondgie d’ faire coégnéchaince d’aivôs ci câre de tiere, not’ tiurie paitché en lai détcheuvre d’lai tieûmune. È s’en allé poi lai raisse des Keller è pe s’ râté ènne boussiatte chu lai péture di Pontat laivous’ qu’ tchaimpoyait lai proue d’ roudges-bétes è pe de tchvâs di v’laidge. È contemplé ci bé paiyisaidge des Fraintches-Montaignes. Pus laivi, â fond d’ lai Combe di Sciet é fsé ènne proiyiere dvaint lai bâmatte d’ lai ptéte Notre-Daime que s’ trôve li.
Tot di long d’ sai maîrtche, è r’méchié l’ Bon Dûe po tos les bïnfaits d’ lai Naiture, è pe âchi d’ laivoi condut dains ci bé câre de tiere po y aippoûetchaie sai boénne pairôle. Aiprès aivoi léchi Lai Mâneût chu sai draitte, è cheuyé ïn p’tét sentie dains lai côte po airrivaie chu les roitches de Tchété Cugny. Li, è tchoiyé quasi chu l’ tiû taint l’paiyisaidge était bé. Le r’diaîd s’ élairdgeait chu tot l’ paiyis d’ Goumois, chu les haimés d’ Vât’nâvre é d’ Gourgouton è pe bïn chur l’Vâ di Doubs da pe Frainqu’mont djunqu’ès Bôs d’ Mondjoûe.
Ïn côp d’pus not’ djûene tiurie r’méchié l’ Bon Dûe de totes ces biâtès. È le r’méchiait tot en tchem’naint en cioujeaint è d’mé les eûyes djunqu’â môment laivous’ qu’é se fsé ïn tchaimbat dains ènne raiçainne è pe tchoiyé aivâ lai roitche. Mains héy’rous’ment è s’ poéyé raittraipaie d’aivô ènne main en ènne braintchatte. Èl était dïnche penju dains l’ veude, n’ se t’niaint qu’ poi ènne main en c’te raîme qu’était bïn çhailatte. Dâli, è yeuvé les eûyes vai l’ cie en chuppiéyaint l’ Bon Dûe d’ l’oyi. È s’ boté è breuyi : «
è y é quéqu’ün, è yé quéqu’ün
?
». Voili que d’ li-enson ènne voûe lu réponjé : «
n’eus p’ pavou, mon fé, léche-te tchoi, mes aindges te v’lans r’tiyeuyi è pe t’condûere â long d’ moi laivousqu’ se trôve tai piaice
!
». Dâli not’ hanne breuyé encoé pus foûe : «
è y é quéqu’ün d’âtre
?
».
Eric Matthey
{{L’histoire racontée par le Micou, Michel Cerf}}
suite
Du côté de chez les Taivains*
La paroisse des Pommerats fut fondée en 1783. Elle est la plus jeune des Franches-Montagnes. Son église, dédiée aux saints Pierre et Paul, fut inaugurée en 1786. C’est la dernière église construite sur le Haut-Plateau. Pourquoi est-ce que je vous parle de l’église des Pommerats
? Eh bien, c’est parce que la petite histoire que je vais vous raconter commence là et que j’aime bien ce village et ses alentours. Mais bien sûr que ça pourrait se passer n’importe où ailleurs. Donc, comme on le dit dans les livres, toute ressemblance avec une personne connue doit être écartée.
Voilà
! Il y avait une fois un jeune curé qui venait d’être nommé aux Pommerats. Le premier dimanche qu’il fit son prêche, l’église était pleine comme un œuf. Cela ne c’était pas vu depuis fort longtemps
! Bien sûr, les paroissiens voulaient voir, et surtout entendre, ce nouveau prêtre. On disait que ce curé-là était un bon vivant, un épicurien.
Du haut de la chaire, il fit un tout beau prêche. Un prêche qui plut bien à ses nouveaux paroissiens. Il parla des péchés et en particulier du péché de gourmandise. Il dit que pour lui la gourmandise n’en était pas vraiment un du moment qu’il apportait du plaisir sans faire de mal à personne. Vous pensez bien que ce prêche a beaucoup plu à la plupart des Taivains qui étaient là, surtout qu’on approchait de la Saint-Martin
!
A la sortie de la messe, il invita les gens à la cure pour leur offrir l’apéro afin de les mieux connaître. A midi et demi, chacun repartit à la maison et, afin de continuer de faire connaissance avec ce coin de pays, notre curé partit à la découverte de la commune. Il s’en alla par la scierie des Keller et s’arrêta un moment sur le pâturage du Pontat où pâturaient le troupeau de vaches et de chevaux du village. Il contempla ce beau paysage des Franches-Montagnes. Plus loin, au fond de la combe du Sciet, il pria devant la grotte de la petite Notre-Dame qui s’y trouve.
Tout au long de sa marche, il remercia le Bon Dieu pour tous les bienfaits de la Nature et aussi de l’avoir conduit dans ce beau coin de terre pour y apporter sa bonne parole. Après avoir laissé La Malnuit sur sa droite, il suivit un petit sentier dans la forêt pour arriver sur les rochers de Château Cugny. Là, il tomba presque à la renverse tant le paysage était beau. Le regard s’étendait sur tout le pays de Goumois, sur les hameaux de Vautenaivre et de Gourgouton et puis bien sûr sur la vallée du Doubs, de Franquemont jusqu’aux Bois de Montjoie.
Une fois de plus notre jeune curé remercia le Bon Dieu de toutes ces beautés. Il le remerciait tout en cheminant, fermant à demi les yeux jusqu’au moment où il se fit un croche-pied dans une racine et tomba en bas des rochers. Mais heureusement, il put se rattraper d’une main à une petite branche. Il était ainsi pendu dans le vide, ne se tenant que par une main à cette bien faible branche. Alors, il leva les yeux vers le ciel en suppliant le Bon Dieu de l’écouter. Il se mit à crier : «
y a-t-il quelqu’un
?
» Voilà que de là-haut une voix lui répondit : «
n’aie pas peur mon fils, laisse-toi tomber, mes anges te recueilleront et te conduiront à mes côtés où se trouve ta place
!
». Alors notre homme cria encore plus fort : «
y a-t-il quelqu’un d’autre
?
».
*Les Taivains = Les Taons, sobriquet des habitants des Pommerats
Eric Matthey