Publié : 1er avril 2022

Vente en ligne

Vente en leingne

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 1 avril 2022

Vente en leingne

Lai Martine, tus ses fréres èt soeurs sont mairiès. Lée, èlle ât d’moérèe véye baîchatte po s’ottyupaie des poirents. C’était dïnche dains l’ temps. Èlle é meinme éy’vè les afaints d’ son pus jdûene frére, le Maitchïn. Mit’naint qu’ les poirents n’ sont pus li, èlle échpére enfïn trovaie ïn mairi. Èlle se dit qu’è n’ât djemais trop taîd èt qu’èlle peut encoé piaire. D’ataint pus qu’an n’yi bèy’rait djemais son aidge. Èt peus, c’ment dit l’ provèrbe, tchéque potat trove son tyeuvéche. Èlle fait v’ni des vétures en leingne qu’èlle essaiye d’vaint son mirou. È n’ se pésse pe ènne snainne que le pochtie n’aippoétche ïn paiquèt d’ lai Redoute ou bïn d’in âtre site. Ç’ât raire qu’èlle aitchete. Son grant paiji, ç’ât d’essaiyie. Aiprés, èlle rebote tot dains l’ cairton qu’èlle repoétche â guichet. Èt peus èlle se r’piondge dains les caitailogues d’vaint que de r’faire ènne novèlle commainde. D’aivéje, po les essaiyaidges, èlle s’enfromme. An peut bïn soénnaie, caquaie en lai poûetche, èlle ne répond pe. Ci djoué-li, dains sai tyutte, èlle é rébiè de ticlaie. Vétie d’ènne reube de lôvrèe, èlle faisait des mainieres dvaint son mirou, toénâyaint èt envirvôg’naint, tiaind qu’elle entend des écâtchèts. Drie lée, son frére Maitchïn l’épyait en ryïnt cment ïn bossu : « Mains qu’ât-ce qu’è t’ prend ? Te fais carimantran ou bïn quoi ? » Notes D’aivéje, d’habitude dains sai tyutte, dans sa hâte toénâyaint èt envirvôg’naint, tournoyant et virevoltant ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

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Tous les frères et sœurs de Martine sont mariés. Elle seule est restée célibataire pour s’occuper de ses parents. C’était ainsi autrefois. Elle a même élevé les enfants de Martin, son frère cadet. Maintenant que les parents sont décédés, elle espère trouver un mari. Elle se dit qu’il n’est jamais trop tard et qu’elle peut encore plaire. D’autant plus qu’on ne lui donnerait jamais son âge. Et puis, comme dit le proverbe, chaque pot trouve son couvercle. Elle fait venir en ligne des vêtements qu’elle essaie devant son miroir. Il ne se passe pas une semaine que le facteur n’apporte un colis de la Redoute ou d’une autre entreprise de vente en ligne. Elle achète rarement. Son grand plaisir, c’est d’essayer. Après, elle remet tous les articles dans leur carton qu’elle reporte au guichet postal. Et puis, elle se replonge dans les catalogues avant que de passer une nouvelle commande. D’habitude, elle s’enferme pour les essayages. On peut sonner, frapper à la porte, elle ne répond pas. Ce jour-là, dans sa hâte, elle a oublié de se barricader. Vêtue d’une robe de soirée, elle prend des grands airs, tournoyant et virevoltant, quand elle entend des éclats de rire. Derrière elle, son frère Martin l’épiait en riant comme un bossu. « Mais qu’est-ce qui te prend ? Tu fais carnaval ou quoi ?