Publié : 20 mars 2020

Livret scolaire

Yivrat d’écôle

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 20 mars 2020

Yivrat d’écôle

Tiaind qu’ le pére s’ât piondgie dains le bulletïn d’ sai baichatte de saze ans, èl ât v’ni enraidgi, è s’ât yevè, èl é breûyè : « Fos l’ camp, d’vaint qu’i n’ te foteuche ènne trifouillèe. Te crais qu’ ç’ât d’aivô dïnche des notes que te veus décreutchi tai maituritè ? Voili ç’ que ç’ât d’ faire lai dôbe â yûe de te pyondgie dains tes étyudes. » Lai baichatte yi é ryié â moère èt èlle ât montèe dains sai tchaimbre. Le lend’main maitïn, èlle n’ât p’ déchendue po dédjunaie. Lai mére é trovè lai tchaimbre bïn randgie. Àtiune traice de lai baichatte. Ch’ lai tâle de neût, ènne lattre aidrassie és poirents. « I aî tyitie lai mâjon po allaie vivre d’aivô ïn hanne. I l’aî coégnu en lai féte de Coérdgenay. Nôs ains dainsie tot l’ soi. È m’é r’condut en l’hôtâ chu sai moto. Nôs s’ainmans. Èl ât mairiè d’aivô des aifaints. » Lai mére é déchendu les égrais c’ment ènne dôbe. « Yés voûere çoli ! » qu’èlle dit en son hanne. « Ç’ât de tai fâte, âchi. C’ment que te l’és endyeulè hyie â soi. » Le pére prend le paipie, le r’touène èt s’bote è rire : « T’és vu ç’ qu’è yi graiy’nè drie ? » È yét : « Ne vôs en faites pe. I fais ïn touè en véyo. È y é pus grave que des croûyes notes en l’écôle. » ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Livret scolaire

Quand le père a pris connaissance du livret scolaire de sa fille de seize ans, il a piqué une rage, il s’est levé, il a hurlé : « Fous le camp, avant que je ne te flanque une raclée. Tu crois que c’est avec de telles notes que tu vas décrocher ta maturité ? Voilà ce que c’est de faire la folle au lieu de te plonger dans tes études. » La fille lui a ri au nez et elle est montée dans sa chambre. Le lendemain matin, elle n’est pas descendue pour déjeuner. La mère a trouvé la chambre bien rangée. Aucune trace de la fille. Sur la table de nuit, une lettre adressée aux parents. « J’ai quitté la maison pour aller vivre avec un homme. Je l’ai connu à la fête de Courgenay. Nous avons dansé toute la soirée. Il m’a reconduite sur sa moto. Nous nous aimons. Il est marié avec des enfants. » La mère a dévalé les escaliers comme une hallucinée. « Lis donc ceci ! » dit-elle à son mari. « C’est de ta faute, aussi. Après la scène que tu lui as faite hier soir. » Le père prend le papier, le retourne et se met à rire : « Tu as vu ce qu’elle a écrit au verso ? » Il lit : « Ne vous faites aucun souci. Je fais un tour à vélo. Il y a plus grave que des mauvais résultats scolaires. »