Publié : 28 juillet 2018

Le printemps

L’ bontemps

Eric Matthey, Robert Lamoureux

L’ bontemps

(traduction du poème Le printemps de Robert Lamoureux) An ont bé dire, mains l’ bontemps, ç’ ât to d’ meinme ènne bïn djôli tchôse. Tchu les rôsies, crâchant des rôses, è pe les pammies s’ vétant d’ bianc. Mains l’ bontemps, èl é bèl è v’ni bïn véti, ç’te poûere tiere é taint d’ ôvraidge qu’ èlle n’ é p’ le temps d’ l’ aidmirie. Musèz-t’ vôs bïn, è vât meu pâre tieûsain d’ lai « bombe atomique ». Tiaind qu’ le bontemps airrive, s’ en allaie vand’laie, ç’ ât piedre son temps. Moi, i l’ veus bïn, mains è foûeche d’ s’ en fotre, d’ se bïn rempiâtre lai painse, è s’ poérait bïn qu’ ènne tchôse se pésseuche, ç’ ât qu’ le bontemps ne r’v’nieuche pus ! È y airé aidé des feuyes és braintches, è pe des çhoés, è pe des sois d’ mai, des maidyites pe des prevences, mains ç’ ât vote tiûere qu’ se sré fromè. Vôs vétçhrèz dains l’ indiff’reince, vôs srèz pé qu’ des moûes-vétçhaints ! Vôs airèz tot è r’bousse-meûtè, main vôs n’ airèz pus d’ bontemps. L’ tiûere d’ ïn hanne, ç’ ât grôs, mains tot d’ meinme, è n’ y fât p’ tot botaie ensoinne. Ch’ èl ât piein d’ « fric » è réffe, l’ bontemps n’ s’ y veut p’ poéyait botaie. An peut aidé faire des « bombes », trovaie di neû po méd’cinnaie, è quoi qu’ çoli sie ch’ d’vaint lai fôsse, an n’ ont dj’mais coégnu l’ bontemps. Çoli m’ engraingne de djûere è ces qu’ saint le d’main, mains s’vïntes-vôs bïn de ç’ qu’ i vôs dis : ch’ le bontemps voit qu’ è nôs embéte, è ne r’veré dj’mais ci. Aidonc, Meschires qu’ moinnèz lai tiere, musèz-t’ vôs en nôs, sïmpyes è humbyes vétçhaints qu’ dains étre li po vadgeaie l’ bontemps. Craites bïn qu’ ch’ le bontemps çhoérât tchétçhe annèe ch’ note bôle de tiere, ç’ n’ ât p’ po ces qu’ faint les « bombes », ç’ ât po ces qu’ les pregnant ch’ le nèz ! È sait bïn qu’ nôs n’ y sons po ran, mains poch’qu’ è nôs ainme c’ment qu’ nôs sons, ç’ ât po nôs les tot p’téts qu’ è vïnt. Dâli Meschires, vôs qu’ an n’ oûeje pe toutchi, tiaind qu’ le s’raye r’yuré dains vote poiye de traivaiye, aippûetes vôs coutres ch’ vote tâle, prentes ènne boussèe d’ répét, pe dites dains ci bon tchâd rés : « Ah, t’ voili, bontemps, les feuyes r’crâchant, bondjoué, siete-te li ! ». Dains ènne loidgiere sentou d’ mousse, l’ bontemps t’ diré d’ sai douçatte voix : « Ç’ ât les p’tétes dgens qu’ m’ enviant ! ». Eric Matthey ---- Le printemps dit par Robert Lamoureux {{Paroles de Le printemps}} Robert Lamoureux On a beau dire mais le printemps, C’est quand même une bien jolie chose Sur les rosiers il pousse des roses Et les pommiers s’habillent en blanc. Mais l’ printemps, c’est vraiment dommage, Il a beau venir bien habillé, C’te pauvre terre a tellement d’ouvrage Qu’elle a même plus le temps d’ le r’garder. Pensez donc, la bombe atomique, C’est tellement plus préoccupant ! A l’époque où l’printemps rapplique, Aller se promener c’est perdre son temps Moi je veux bien mais je peux vous dire Qu’à force de jouer les blasés, les repus, Il y a une chose qui pourrait se produire, C’est que Le printemps, il ne revienne plus Y aura toujours des feuilles aux branches, Des nuits chaudes et des fleurs de mai, Des marguerites et des pervenches, Mais c’est votre coeur qui sera fermé Vous vivrez dans l’indifférence, Vous s’rez pire que des morts-vivants Vous n’aurez plus que l’opulence Seuleument vous n’aurez plus Le printemps. L’ coeur d’un homme c’est grand, mais quand même, Faut pas y mettre tout à la fois, S’il est bourré d’fric à l’extrême, Ben l’printemps, il entrera pas On peut toujours construire des bombes, Inventer des médicaments A quoi ça sert si d’vant la tombe On n’a jamais connu Le printemps ? Alors, Messieurs qui m’nez la Terre, Pensez à nous, humbles vivants, Car au fond nous sommes nécessaires, Car c’est nous qui gardons l’printemps ! Vous pensez bien que si, dans l’monde, Le primtemps fleurit chaque année, C’est pas pour ceux qui font les bombes, C’est pour ceux qui les prennent sur le nez. Il vient en s’disant qu’en somme, Nous, on n’est responsable de rien, Et comme il nous aime comme nous sommes, C’est pour nous, les petits, qu’il vient Alors, Messieurs les intouchables, Quand l’ soleil s’ra dans vot’ bureau Accoudez-vous sur votre table Et dites, dans ce rayon tout chaud : "Voilà les feuilles qui repoussent Bonjour printemps, assieds- toi là" Et dans une frêle odeur de mousse, Le printemps dira d’une voix douce : "Ce sont les humbles qui m’envoient"