Publié : 15 juin 2018

La cuisine chinoise

Lai tyeujènne chinoise

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 15 juin 2018

Lai tyeujènne chinoise

A djoué d“adj”d’heu, les dgens n’ se contentant pus de ç’ qu’ès aint aippris en l’écôle. Ès continyant d’ raicoédgeaie. Brament cheuyant des coués di soi. È y é di tchoi : les laindyes, lai coujûre, les pyantes savaidges, lai saintè, èt meinme le patois. Lai Virdginie è cheuyè ïn couè de tyeujènne chinoise. Èlle feut entchaintèe. Èlle en è gray’nè des r’çattes, piein ïn çhaissou : nodlés sâtès és p’tèts lédyumes, rolats di paitchi-feu, poulat en lai sâce fie-douçatte, èt taint d’âtres. Dâdon, è n’ se pésse pe ïn djouè qu’èlle n’aipprâteuche ènne chinoij’rie. Le Raoul èt les afaints sont sôles de çte tyeujènne èt se d’maindant tiaind qu’ ès poérraint enfïn maindgie des m’nus tot sïmpyes de tchie nôs. Ah, le bon toétché des paiyaisainnes d’Aidjoûe, le reuti d’ lai bèlle-mére, le p’tèt laid bïn sât, l’aindoéye de ménaidge ! Ran qu’ d’y musaie, ès en aint l’âve en lai boûetche. Lai Virdginie ât pyondgie dains son çhaissou. Èlle tçhie ïn mets bïn rey’vè po dûemoène. « Voili, qu’èlle dit, i vôs veus faire ïn boérèt és oraindges. Moi, i m’ tchairdge di boérèt. Toi, Raoul, t’adrés m“atch”taie l’ rèchte. I t’ veus graiy’naie ènne lichte. T’ n’és p’ fâte d’allaie en lai Migros. T’ veus tot trovaie â maigaisïn di coénat. È fât taint qu’an peut faire è dyaingnie le commèrce di v’laidge. » Le saim’di maitïn, le Raoul entre dains lai kaufhoûse : -- Bondjoué, l’hanne. I voérrôs des pammes è tyueudre. Lai Virdginie é djâsè d’ faire ïn boérèt és oraindges. -- Çoli n’ serait p’ putôt des oraindges qu’èlle vôs é dit ? -- Nian, poéche que ma femme n’è p’ trovè de boérèt. Dâli, èlle é pris tot di boudïn en lai boétch’rie. Notes ïn çhaissou, un classeur des rolats di paitchi-feu, des rouleaux de printemps lai sâce fie-douçatte, la sauce aigre-douce lai kaufhoûse, l’épicerie (allemand Kaufhaus) ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

La cuisine chinoise

De nos jours, les gens ne se contentent plus de ce qu’ils ont appris à l’école. Ils continuent d’étudier. Beaucoup suivent des cours du soir. Il y a du choix : les langues, la couture, les plantes sauvages, la santé, et même le patois. Virginie a suivi un cours de cuisine chinoise. Elle fut enchantée. Elle en a recopié des recettes, plein un classeur : nouilles sautées aux petits légumes, rouleaux de printemps, poulet à la sauce aigre-douce, et tant d’autres. Depuis, il ne se passe pas un jour qu’elle ne cuisine quelque chinoiserie. Raoul et les enfants sont las de cette cuisine et se demandent quand ils pourront enfin manger des menus tout simples de chez nous. Ah, le bon gâteau à la crème des paysannes d’Ajoie, le rôti de belle-maman, le petit lard bien sec, la saucisse de ménage ! Rien que d’y penser, ils en ont l’eau à la bouche. Virginie est plongée dans son classeur. Elle cherche un mets bien relevé pour dimanche. « Voilà, dit-elle, je vais vous faire un canard à l’orange. Moi, je me charge du canard. Toi, Raoul, tu iras m’acheter le reste. Je te dresserai la liste. Tu n’as pas besoin d’aller à la Migros. Tu trouveras tout à l’épicerie du coin. Il faut autant qu’on peut favoriser le commerce local. » Le samedi matin, Raoul entre dans l’épicerie : -- Bonjour ! Je voudrais des pommes à cuire. Virginie a parlé de faire un canard à l’orange. -- Ce ne serait pas plutôt des oranges qu’elle vous a dit ? -- Non, parce que ma femme n’a pas trouvé de canard. Alors, elle a pris du boudin à la boucherie.