Publié : 22 décembre 2016

L’Esprit de Noël

L’ Échprit d’ Nâ

Jean-Marie Moine, Arc Hebdo décembre 2016

L’ Échprit d’ Nâ

Des Péres Nâ dains tos les câres…, des éçhairies n’ en veus-t en voili…, des loitch’ries è r’bousse meûté po s’ fotre dains lai painse…, di vilapidaidge, d’ lai poyuchion d’ l’ envirvôj’-naidge … Les dgens n’en ont dj’mais prou ; ès s’ léchant aiveuyie poi tote ç’te riuaince, tein-taie en boinne couchieinche poi ç’te churaibondainche de bïns, pe - oh chaicriyédge - s’ pèr-mâttant encoé d’ïnvotçhaie l’ « Échprit d’ Nâ » ! Che Dûe était li âdjd’heû, i seus quâsi chûr qu’ è tcheuss’rait ïn côp d’ pus les voulous di tempye… Chûr’ment qu’ po brâment d’ vôs, l’ Échprit d’ Nâ, ç’ n’ât hèy’rouj’ment piepe ïn poi çoli. I r’vïns en d’rie, tiaind qu’ nôs pai-rents nôs ains fait è aisseinti ïn pô ç’ que c’ était qu’ l’Échprit d’ Nâ. En premie, è y’ aivait l’ Aiveint qu’ était ènne èchpèche de couarïnme. Pe, airrivait lai neût d’ Nâ. Lai vaye de Nâ, nôs déchendïns en faimille le Bout-d’ Tchus po allaie en lai mâsse de méneût. Tchétçhe annèe, an ôyait yun d’ ces poûeres bogres di v’laidge, ci Diu, que tchaintait l’ « chréchtien Méneût ». Tot était noi, è paît les quéques yumieres d’ lai vie è pe des mouriaides de yeû-tchïns dains l’ cie. L’ môtie était piein è craiquèe. Tot d’ ïn côp, d’vaint lai rantche, lai djoûe nôs envayéchait di temps qu’ lai Sïnte-Cécile entoénait les che bés tchaints d’ Nâ. Mains, èl airrivait qu’ yun des âtres poûeres diaîles di v’laidge v’nieuche en lai mâsse de méneût. Ïn pô crattou, è f’sait c’ment qu’ le pubyicain d’ lai pairaibole, è n’ oûejait p’ v’ni pus d’vaint dains l’ môtie. Quâsi tot l’ monde eur’ciait lai comm’nion. Ènne priegondouje coidge emprijait les fidèyes, tiaind qu’ note tiurie, l’ aibbé Monn’rat, poétchaint l’ sïnt chiboire entre ses mains, s’ aippreutchait en boétaiyaint d’ ci poûere grôsfâtou, po y’ bèyie lai sïnte comm’nion ! Sobtainn’ment, l’ « Échprit d’ Nâ » était li, nôs l’ ôyïns tus çhioûeçhaie â pus fond d’ nôte tiûere… V’nians-en mit’naint â paitrimouniâ seinche de Nâ, qu’ n’ é ran è voûere daivô l’« Echprit d’ Nâ ». L’ Pére Nâ, nôs n’ le voyïns dj’mais. An saivait bïn qu’ èl était péssè pochqu’ â pie di saipïn d’ Nâ, dains nôte soulaîe, è y’ aivait ènne piaique de chocolat, dous trâs caicavouètes pe ènne oûeraindge. È réjon d’ïn carrè d’ chocolat poi djoué, nôs n’ aivïns po trâs s’nainnes è maindgie tot lai piaique. È n’ fât p’ rébiaie d’ dire non pus, qu’ nôs étïns hèy’rous pochque l’ aîne di Pére Nâ aivait engoulè tot l’ valmon d’ foin qu’ nôs aivïns botè d’vaint l’ hôtâ po lu. È n’ y’ en d’moérait piepe ènne beûtche… Qué douçats è bés seûv’nis ! J-M. Moine

L’Esprit de Noël

Des Pères Noël dans tous les coins…, des illuminations en veux-tu en voilà…, des gourmandises à satiété pour se les flanquer dans la panse…, du gaspillage, de la pollution de l’environnement… Les gens n’en ont jamais assez ; ils se laissent aveugler par toute cette brillance, tenter en bonne conscience par cette surabondance de biens, et - oh sacrilège – se permettent encore d’invoquer l’« Esprit de Noël » ! Si Dieu était là aujourd’hui, je suis presque certain qu’il chasserait une fois de plus les voleurs du temple… Certainement que pour beaucoup de vous, l’Esprit de Noël, ce n’est heureusement pas du tout cela. Je reviens en arrière, quand nos parents nous ont fait ressentir un peu ce qu’était l’Esprit de Noël. En premier, il y avait l’Avent qui était une espèce de carême. Puis, arrivait la nuit de Noël. La veille de Noël, nous descendions en famille le « Bout-d’ Tchus » (à Montignez) pour aller à la messe de minuit. Chaque année, on entendait l’un de ces pauvres bougres du village, Jules, qui chantait le « Minuit chrétien ». Tout était noir, à part quelques lumières de la rue et des myriades d’étoiles dans le ciel. L’église était pleine à craquée. Tout d’un coup, devant la crèche, la joie nous envahissait pendant que la Sainte-Cécile entonnait les si beaux chants de Noël. Mais, il arrivait que l’un des autres pauvres diables du village vienne à la messe de minuit. Un peu crasseux, il faisait comme le publicain de la parabole, il n’osait pas venir plus en avant dans l’église. Presque tout le monde recevait la communion. Un profond silence s’emparait des fidèles quand notre curé, l’abbé Monnerat, portant le saint ciboire entre ses mains, s’approchait en boitillant de ce pauvre indigent, pour lui donner la sainte communion ! Soudainement, l’« Esprit de Noël » était là, nous l’entendions tous souffler au plus fond de notre cœur… Venons-en maintenant au sens patrimonial de Noël qui n’a rien à voir avec l’ « Esprit de Noël ». Le Père Noël, nous ne le voyions jamais. On savait bien qu’il avait passé puisqu’au pied du sapin de Noël, dans notre soulier, il y avait une plaque de chocolat, deux trois cacahouètes et une orange. A raison d’un carré de chocolat par jour, nous en avions pour trois semaines à manger toute la plaque. Il ne faut pas oublier de dire non plus, que nous étions heureux parce que l’âne du Père Noël avait avalé tout le tas de foin que nous avions mis devant la maison pour lui. Il n’en restait pas un fétu…Quels doux et beaux souvenirs ! J-M. Moine