Publié : 5 septembre 2016

Toujours plus

Aidé pus

La Babouératte, Marie-Louise Oberli

Aidé pus

-- Hé ! Les afaints, aimouénèz-vos. Pai ci bé temps, nos vlans allaie nos pouérmenaie djünqu’â finaidge. Botaie de bons soulaies, lai vie ât aivu retchâssie de groise. Ne pon rébyaie ïn tchaipé, le soroiye frit fôe adjd’heu. Nyan, nyan, Charly ! Pon de pouétchain, tchri putôt ton couté de baigatte, dïnche djâsait le pére en ses afaints. En ci duemouêne lai reûssue, les fons rentrès, è s’aiccouédjait ïn pyaisi. Péssaie lai reûssue aivô sai rotte. -- És-te prâte mai fanne ? – Aiye. Y n’aî pus qu’ai cyôre lai pôtche. Pai lai vie, tot-content, ès airrivant à finaidge. Lai boûenne sentou di fon que soitche syaitte les nairines des mairtchous. -- Que çoli chmeûque bon ! s’émervoiye lai rotte. – Moiyou qu’â rive de lai graind-route, aidjoute Charly. En djâsant pe en couéynant, bâlement, ès airrivant en lai rive di bôs. Ïn airrât ât le bïnveni. Staie dains l’hérbe, les afaints posant des quéchtions tus en lai fois. -- Hé ! Lai djûenasse ! Tot pyain. L’ün aiprés l’âtre. Y ne seus pon ïn sciençou ! Y n’aî cheuyi que l’écôle de mon vlaidge voùé nos étaïnt ène trenténe d’éyeuves. Dains mon temps, les afaints édaïnt és traivés de lai férme pouéche que : quâsi tot se faisait en lai main. Nos n’aivaïns vôre de boussiattes po s’aimusaie. Mains, nos étaïns hèyuroux. -- Papa, poquoi è n’y é pus de sious dains les tchaimps ? Tot ât voit. Çoli mainque de môlures ! Ïn po empotaidgie, le père échplique : -- Le raippouétche, te saîs ço que ç’ât ? Nyan ? Ç’ât aidé pus pe çoli dains tot. D’aivaintaidge de môtres, de guïmbardes, totes sôtches de machines. Sains rébyaie : lai tchée, les lédjumes, le laicé. Po ne pon étre en lai trïnne, les dgens de lai térre int odjoiyie des engrains dains les tchaimps po aivoi d’aivaintaidge de fon. Mains, les sious aint quâsiment évadnè. Les sious de tchie nos, n’int fâte d’engrain. Lai pyeudje pe le soroiye yos seuffiant. Nos l’ains rébyè. Ïn sileince poisaint tchoit su lai petéte rotte. -- Papa, te nos fos les byeûs ! tchaimpe Charly. Peus è demainde en son graind frérat : -- Tu n’és pon ène chiclette Dédé ? – Nyan. Ce n’ât’p bon po lai naiture. Étchepaie pai térre, çoli empôsène lai térre. Charly é lai landye bïn pendue. Di tac au tac, è y revire : -- Cment lés mégots de tés chtoumfs ! Les tchaipitraidges des afaints pyaquant tchaind lai mére demainde : -- Tchu veut ïn mouéché de métchatte ? Totes les mains se tendant. -- Lai pouérmenade eûvre l’aippétit, pe lai métchatte de Maman, ç’ât di fïne-meux, aidjoute Pauline. È fait tchâd. Quéques gôuérdgies d’âve po mouéyie le gairgueusson seraïnt les bïnvenies. Te ne crais pon Papa ? – Syé. Tot-content, nos vlans airrivaie â nô de lai Péture di Droit. L’âve y ât frâtche pe bouénne. – È fât fifraie en l’engolate di tyau. Y n’ai pon de varres, aiveutchit lai mére. Hé, mon hanne ! T’és vu l’hoûre ? – Nom d’mai vie ! Y n’aî pon vu le temps péssaie. Les vaitches daint aittendre devaint lai pôtche de l’étâle. Lai reûssue é péssè cmen ène élûse. Sôle, mais hèyurouse, lai rotte muse dje en ène âtre tirie feûs. -- Nos ains lai tchaince d’étre venis â monde dains ïn ce bé paiyis. È fât y demouéraie, éprovaie de le voîdjaie tâ qu’èl ât. Vos ôyites les afaints ? Lai Babouératte

Toujours plus

-- Hé ! Les enfants amenez-vous. Par ce beau temps, nous voulons aller nous promener jusqu’au finage. Mettez de bons souliers, le chemin vicinal a été rechaussé de tout-venant. Ne pas oublier un chapeau, le soleil tape fort aujourd’hui. Non, non, Charly ! Pas de portable, cherche plutôt ton canif, ainsi parlait le père à ses enfants. En ce dimanche après-midi, les foins rentrés, il s’accordait un plaisir : passer l’après-midi avec sa famille. -- Es-tu prête ma femme ? – Oui. Je n’ai plus qu’à fermer la porte. Par le chemin vicinal, de suite, ils arrivent au finage. La bonne odeur du foin qui sèche flatte les narines des marcheurs. -- Que ça sent bon ! s’émerveille la bande. – - Meilleur qu’au bord de la grand-route, ajoute Charly. En causant et en plaisantant, gentiment, ils arrivent à l’orée de la forêt. Une pause est la bienvenue. Assis dans l’herbe, les enfants posent des questions tous à la fois. -- Hé ! La jeunesse ! Tout calme. L’un après l’autre. Je ne suis pas un savant ! Je n’ai suivi que l’école de mon village où nous étions une trentaine d’élèves. Dans mon temps, les enfants aidaient aux travaux de la ferme parce que : presque tout se faisait à la main. Nous n’avions guère de moments pour s’amuser. Mais, nous étions heureux. – Papa, pourquoi il n’y a plus de fleurs dans les champs ? Tout est vert. Ça manque de couleurs ! Un peu embarrassé, le père explique : -- Le rendement, tu sais ce que c’est ? Non ? C’est toujours plus et cela dans tout. Davantage de montres, d’autos, toutes sortes de machines. Sans oublier : la viande, les légumes, le lait. Pour ne pas être à la traîne, les gens de la terre ont utilisé des engrais dans les champs pour avoir plus de foin. Mais, les fleurs ont presque disparu. Les fleurs de chez nous n’ont pas besoin d’engrais. La pluie et le soleil leur suffisent. Nous l’avons oublié. Un silence pesant tombe sur la petite bande. -- Papa, tu nous fiches les bleus ! lance Charly. Puis il demande à son grand frère : -- Tu n’as pas un chewing-gum Dédé ? – Non, ce n’est pas bon pour la nature. Craché par terre, ça empoisonne le sol. Charly a la langue bien pendue. Du tac au tac, il lui retourne : -- Comme les mégots de tes cigares ! Les chamailleries des enfants cessent lorsque la mère demande : -- Qui veut un morceau de tresse ? Toutes les mains se tendent. -- La promenade ouvre l’appétit et la tresse de Maman, elle est superfine, ajoute Pauline. Il fait chaud. Quelques gorgées d’eau pour mouiller le gosier seraient les bienvenues. Tu ne crois pas Papa ? – Oui. Tout de suite, nous voulons arriver à l’abreuvoir de la Pâture du Droit. L’eau y est fraîche et bonne. – Il faut boire au goulot du tuyau. Je n’ai pas de verres, avertit la mère. Hé, mon homme ! Tu as vu l’heure ? – Nom d’une pipe ! Je n’ai pas vu le temps passer. Les vaches doivent attendre devant la porte de l’étable. L’après-midi a passé comme un éclair. Fatiguée, mais heureuse, la famille pense déjà à une future sortie. -- Nous avons la chance d’être nés dans un si beau pays. Il faut y rester, essayer de le garder tel qu’il est. Vous entendez les enfants ? La Coccinelle