Publié : 18 décembre 2015

Lettre au Père Noël

Lattre â Pére Nâ

Bernard Chapuis

Paru dans LQJ, le 18 décembre 2015

Lattre â Pére Nâ

- Dites-me voûere, les afaints, qués crômas vôs échpérèz eurcidre è Nâ ?  Lo grôs Damien, qu’aivait di mâ d’ çhoûeçhaie foûeche qu’él était mota, dyé : « Ènne gâgui ! » Nôs ains tus riè cment des bossnats. Lo Fédo, qu’était dj’ trébéyat, v’lait ïn kvehr po allaie bratçhaie lai Raiffeisen. Lai Stéphanie ne v’lait ran di tot. « I ai dj’ bïn prou. È fât sondgie és poueres afaints que n’ mandgeant p’ en yote faim èt que sont mâ vétis. » Lai régente s’ât toénèe vâ moi : - Èt peus toi, mon ptèt Rémi, qu’ât-ce que t’ainm’rôs eurcidre è Nâ ? Qué crôma ât-ce que t’és d’maindè ? - Ïn tchait. - Ç’ n’ât p’ ïn crôma, çoli, dyé l’Eustache. Nôs en ains piein lai graindge. - Léchietes-le djâsaie. Èt cment qu’ t’és fait tai d’mainde ? - I ai graiy’nè ènne lattre â Pére Nâ, hyie â soi. I l’é léchie ch’ mai tâle de neût. Ci maitin, èlle n’y était pus. - Ç’ât tai mére que l’é pris, ou bïn ton pére. - Nian. Lo Pére Nâ n’é fâte de niun. Tos mes caim’rades se sont fotus de moi : « Hou, è crait encoé â Pére Nâ. » Lai régente eut grant poéne è m’ concholaie : - Ne t’en fais p’, mon p’tèt Rémy, te l’airés, ton tchait. È Nâ, è y aivait, dains ïn p’nie dôs l’ saipïn, ïn bé djûene gris tchait. È n’ m’é p’ faiyu grant po compâre que c’était la régente que l’aivait aippoétchè. ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Lettre au Père Noël

-- Dites-moi donc, les enfants, ce que vous espérez recevoir à Noël. » « Une poupée ! dit le gros Damien, qui était obèse et respirait avec difficulté. Nous avons tous ri comme des bossus. Fédo, le dégourdi, voulait un fusil pour aller braquer la banque Raiffeisen. Stéphanie ne voulait absolument rien. « J’ai déjà bien assez. Il faut songer aux pauvres enfants qui ne mangent pas à leur faim et qui sont mal vêtus. » La maîtresse s’est tournée vers moi : -- Et toi, mon petit Rémi, qu’est-ce que tu aimerais recevoir à Noël ? Quel cadeau as-tu demandé ? -- Un chat. -- Ce n’est pas un cadeau, ça, dit Eustache. Nous en avons plein la grange. -- Laissez-le parler. Et comment as-tu fait ta demande ? -- J’ai écrit une lettre au Père Noël hier soir. Je l’ai laissée sur ma table de nuit. Ce matin, elle n’y était plus. -- C’est ta maman qui l’a prise, ou bien ton papa. -- Non. Le Père Noël n’a besoin de personne. Tous mes camarades se sont moqués de moi : « Hou, il croit encore au Père Noël. » La maîtresse eut beaucoup de mal à me consoler : -- Ne t’en fais pas, mon petit Rémy, te l’auras, ton chat. A Noël, il y avait, dans une corbeille sous le sapin, un beau chaton gris. Il ne me fallut pas longtemps pour comprendre que c’était la maîtresse qui l’avait apporté. La chronique patoise du QJ en direct :