Par : Fleury LJ
Publié : 14 novembre 2014

La Saint-Martin au paradis

Lai Sïnt-Maitchïn â Pairaidis

Bernard Chapuis

Paru dans LQJ du 14 novembre 2014

Lai Sïnt-Maitchïn â Pairaidis

{En ci dûemoène de Sïnt-Maitchïn, tchie l’Bon Dûe li enson, è y aivait tot piein d’bé monde, des Taignons, des Vadais, des tiuries, des soeûrs, des paiyisains, des bordgeais, des chires, des poûeres, des djûenes, des véyes. Èt peus trétus tchaintïnt d’aivô les aindges â pie d’lai Sïnte Vierdge : « Alléluia, alléluia ! » Mains dains ïn câre, è y en aivait qu’étïnt tot trichtes. C’étaient dés Aidjolats. Sïnt Piere yôs dié : - Poquoi qu’vôs n’tchaintèz pe d’avô les âtres ? Vôs n’étes pe hèy’rous poi chi ? Qu’est-ce qu’è vôs fait défât ? Yun d’Bonfô s’appreutche, s’bote è dg’nonye èt peus yi dit : - Tot chu qu’an ât bïn tchie vôs. Mains, vôs voites, adjd’heû, ç’ât lai Sïnt-Maitchïn. Ch’lai tiere, ès ribotant, ès ripaîyant, ès fifrant, ès trêuyant, ès dainsant. Çoli nôs encrât de ne pus étre d’aivô yos. I m’muse que Sïnt Piere feut bïn embretchoéyie daîvô ces bambochous. È n’poéyait ne les boussaie feûe di pairaidis ne yos permâtre d’y faire lai nace.} {embretchoéyie,} embarrassé ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

La Saint-Martin au paradis

(Jour de Saint-Martin. Les Ajoulots au paradis ont la nostalgie des banquets pantagruéliques qu’ils ont connus sur terre.) En ce dimanche de Saint-Martin, chez le Bon Dieu là-haut, il y avait bien du beau monde, des Taignons, des Vadais, des curés, des sœurs, des paysans, des bourgeois, des riches, des pauvres, des jeunes, des vieux. Et tous chantaient avec les anges au pied de la Sainte Vierge : « Alléluia, alléluia ! » Mais dans un coin, certains étaient tout tristes. C’étaient des Ajoulots. Saint Pierre leur dit : - Pourquoi est-ce que vous ne chantez pas avec les autres ? Vous n’êtes pas heureux ici ? Qu’est-ce qui vous manque ? Un de Bonfol s’approche, se met à genoux et dit : - Certes, on est bien chez vous. Mais, vous voyez, aujourd’hui, c’est la Saint-Martin. Sur la terre, on ribote, on ripaille, on picole, on écluse, on danse. Nous regrettons de ne plus être avec eux. Je pense que Saint Pierre fut bien embarrassé avec ces fêtards. Il ne pouvait ni les chasser du paradis ni leur permettre d’y faire lai noce. ---- La chronique patoise du QJ en direct :