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Par : Fleury LJ
Publié : 27 janvier 2012

Not’ Montaignon, notre cheval franc-montagnard

Eric Matthey

Not’ Montaignon

{È Gamine, Rubine, Mignonne, Bijou, Jeannette, Fleurette, pe en tus les âtres qu’aint brecie mes sondges d’afaint !} È tchétçhe paiyis, en tchétçhe câre de tiere, lai naiture é bèyie és hannes ç’ qu’ è fayait po churvétçhie, po traivaiyie, po yot’ bïn-étre. Not’ paît feut les bôs, les tchaimpois, les torbieres. Ènne tiere qu’èl é fayu éssappaie d’vaint que d’l’ airaie, d’ lai vengnaie pe d’ lai moûech’naie. Dâli, po édie les dgens d’nôs campaignes, le tchvâ di Jura feut ïn bèye di cie ! È l’ fayait foûe, traipat, paîje pe docile. È l’ feut, lai naiture aiyaint bïn fait les tchôses. Not’ Montaignon s’aiccodgé d’ aivô les yûes pe les dgens. Poi lai cheûte, aidé les déchendaints des bétes cheûyainnent ç’tés des hannes. Ç’ ât lu qu’ édait è soûetchi l’ bôs des côtes, è airaie les tchaimps, è soiyie, è foinnaie pe è raimoinnaie l’ fon vou l’ voiyïn en lai graindge. È feut aito li l’huvie po tirie l’ tchâlou è eûvri les tch’mïns. En lai fèrme, èl était l’ aimi d’ tchétçhun. Lai paiyisainne l’pregnait po allaie en vèlle vou â v’laidge. Aivô lée, è saivait qu’ è n’ daivait p’ trïnnaie en tch’mïn poch’qu’èlle yi tirait tot comptant chu l’ more d’aivô les dyides, obïn ç’te tchairvôte yi fotait ïn bon p’tét côp d’ rieme ! Mains è saivait âchi qu’ dains lai baigatte d’ lai fanne è y aivait aidé ïn moéché d’ pain obïn d’ socre po lu. Not’ Montaignon c’était bïn chur, i dirôs meinme chutôt, l’ caim’râde des aifaints. D’ lai fïn en l’hôtâ, d’lai graindge en l’étâle, ès s’ botïnt chus son lairdge dôs en s’craimpoénaint â boéré. Lu, mairtchait tot bal’ment, aittraipaint tot d’ meinme en péssaint ènne goulèe d’hierbe vou d’ fon, d’vaint qu’ de piondgie son more dains l’ nô, è pe de r’diaingnie sai piaice en lai rantche â long des roudges-bétes. É pe, tiaind qu’le môment di grant dépaît aivait soénè po son maître, tiaind qu’lai Grosse Soiyouse aivait péssè, ç’ ât encoé lu qu’ le moinnait â ceinm’tiere po l’botaie dains lai douçatte tiere di Jura. Oh, ç’ n’ ât p’ ïn pur-saing not’ tchvâ d’lai Montaigne. Ç’ ât ïn tchvâ d’aippiait, ïn simpye tchvâ d’paiyisain. Mains ç’ feut ïn sacrè l’ôvrie. Tchétçhe côp qu’ an ont aivu fâte de lu, èl é réponju : « i seus li ! ». Dains les bons c’ment dains les croûeyes djoués, dains lai djoûe pe dains lai poinne, è feut toûedje oûeyaint. L’ paiyisain pe l’ tchvâ étïnt d’ côte djunqu’ en lai moûe … d’ yun obïn d’ l’ âtre. Not’ Montaignon ât aivu fait échqueprès po nôs, nôs y’ dains brâment de r’coégnéchaince. {Les Foulets le 9 de feuvrie 2001 Eric Matthey} {Ïnchpirè de « En poussant nos clédars » de Walther Dubois dit Le Calamier} ----

Notre Montagnon

(Notre cheval franc-montagnard) A Gamine, Rubine, Mignonne, Bijou, Jeannette, Fleurette, et à tous les autres qui ont bercé mes rêves d’enfant ! A chaque pays, à chaque coin de terre, la nature a donné aux hommes ce qu’il fallait pour survivre, pour travailler, pour leur bien-être. Notre part fut les forêts, les pâturages, les tourbières. Une terre qu’il a fallu essarter avant de la labourer, de l’ensemencer puis de la moissonner. Alors, pour aider les gens de nos campagnes, le cheval du Jura fut un don du ciel ! Il le fallait fort, trapu, calme et docile. Il le fut, la nature ayant bien fait les choses. Notre Montagnon s’accorda avec les lieux et les gens. Par la suite, toujours les descendants des bêtes suivirent ceux des hommes. C’est lui qui aidait à sortir le bois des forêts, à labourer les champs, à faucher, à faner puis à ramener le foin ou le regain à la grange. Il fut aussi là l’hiver pour tirer le triangle et ouvrir les chemins. A la ferme, il était l’ami de chacun. La paysanne le prenait pour aller en ville ou au village. Avec elle, il savait qu’il ne devait pas traîner en chemin parce qu’elle lui tirait tout de suite sur le mors avec les guides, ou bien cette charrette lui foutait un petit coup de fouet ! Mais il savait aussi que dans la poche de la femme il y avait toujours un morceau de pain ou de sucre pour lui. Notre Montagnon c’était bien sûr, je dirais même surtout, le camarade des enfants. Du finage à la maison, de la grange à l’écurie, ils se mettaient sur son large dos en se cramponnant au collier. Lui, marchait tout gentiment, attrapant tout de même en passant une bouchée d’herbe ou de foin, avant de plonger son museau dans l’abreuvoir puis de regagner sa place à la crèche à côté des vaches. Et puis, quand le moment du grand départ avait sonné pour son maître, lorsque la Grande Faucheuse avait passé, c’était encore lui qui le menait au cimetière pour le déposer dans la douce terre du Jura. Oh, ce n’est pas un pur-sang notre cheval de la Montagne. C’est un cheval de trait, un simple cheval de paysan. Mais ce fut un sacré ouvrier. Chaque fois qu’on a eu besoin de lui, il a répondu : « je suis là ! ». Dans les bons comme dans les mauvais jours, dans la joie et dans la peine, il fut toujours fidèle. Le paysan et le cheval étaient ensemble jusqu’à la mort … de l’un ou bien de l’autre. Notre Montagnon a été fait exprès pour nous, nous lui devons beaucoup de reconnaissance. {Les Foulets, le 19 février 2001 Eric Matthey} {Inspiré de « En poussant nos clédars » de Walther Dubois dit Le Calamier} ---- Voir le film Atteler les chevaux, Aipiayie les tchvâs