Publié : 6 mai 2022

Le bonheur est dans le pré

Le bonhèye ât dains lai priere

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 6 mai 2022

Le bonhèye ât dains lai priere

Ïn traye crâchait â long d’ïn tch’mïn. Èl airait poéyu vivre longtemps èt hèyrou. Mains voili, èl aivait quaitre feuyes. Le traye è quaitre poétche bonhèye. Tus les aimoérous le tyeuyant. Èl ainnonce les mairiaidges, èl aichure lai tchaince és djûes, è promât saintè èt rétchaince. Ève, la premiere fanne èt notre mére en tus, tyaind qu’èlle feut tcheussie di pairaidis, empoétché ïn traye dains sai fûete. Le traye è quaitre é des pouvois saicrès. È protédge des r’venyaints. È dyérit d’ lai fievre. È fait è fûere le diaîle. Ç’ât che vrai que le diaile, ci peut djailou, vangne de neût des croûeyes hierbes po épreuvaie d’ l’étôffaie. Mai mére avait le don po trovaie des trayes è quaitre. Poi les bèlles vâprèes de paitchi-feu, nôs s’ poérmenïns è traivie l’ finaidge. Èlle me dyait le nom çhoés : « Çtée-ci, qu’ât che bèlle rôje, ç’ât lai cardaimine, o bïn fâ crâch’niat, An peut lai maindgie en salaidge. Çtée-li, lai djâne, ç’ât le poérpie. Les vaitches ne maindgeant p’ le poérpie. Èlles tchaimpoiyant tot atoé. » Nôs étïns en train de faire ïn gros bocat de ces frâtches çhoés di bontemps, tyiaind qu’ mai mére se béche èt se ryeve âch’tôt. « Ravoétèz, les afaints ç’ qu’i aî trovè  ! » Èlle tenyait ïn traye è quaitre entre le peuce èt l’ïndèchque . Notes lai priere, le pré, la prairie le paitchi-feu, le printemps ; synonyme : le bontemps e crâch’niat, cresson le poérpie, la renoncule ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Le bonheur est dans le pré

Un trèfle croissait le long d’un chemin.Il aurait pu vivre longtemps et heureux. Seulement voilà, il avait quatre feuilles. Le trèfle à quatre est gage de bonheur. Tous les amoureux le cueillent. Il prédit les mariages, il porte chance aux jeux, il promet santé et richesse. Quand elle fut chassée du paradis, Ève, la première femme et notre mère à tous, emporta un trèfle dans sa fuite. Le trèfle à quatre a des pouvoirs sacrés. Il protège des revenants. Il guérit de la fièvre. Il fait fuir le diable. C’est si vrai que le diable, cet affreux jaloux, sème de nuit des mauvaises herbes pour tenter de l’étouffer. Ma mère avait un don pour trouver des trèfles à quatre. Par les après-midi ensoleillés de printemps, nous nous promenions à travers la campagne. Elle me disait le nom fleurs : « Celle-ci, qui est si belle rose, c’est la cardamine, ou faux cresson. On peut la manger en salade. Cette jaune-là, c’est la renoncule. Les vaches ne mangent pas la renoncule. Elles broutent tout autour. » Nous étions en train de faire un gros bouquet de fleurs printanières quand ma mère se baisse et se relève aussitôt. « Regardez, les enfants, ce que j’ai trouvé ! » Elle tenait un trèfle à quatre entre le pouce et l’index. { {{Les chroniques patoises de Bernard Chapuis en 2022}} } {{ {Toutes les chroniques patoises de Bernard Chapuis} }}