Publié dans le Quotidien Jurassien le 11 juin 2021
Lai novèlle véjine
An ne r’coégnât pus le v’laidge. Les mâjons aint crâchu cment des mouchirons. «
D’vaint tchie nôs, dit çt’Alcide, des dgens v’nis d’ lai vèlle aint conchtrut ènne villa d’aivô ènne piscine. Ci en d’vaint, è y aivait des pammattes, di biè, an y f’sait lai moûechon. È y aivait ïn pran laivoù qu’ le paiysain fannait. L’hèrba, èl y botait ses vaitches è tchaimpoyie.
»
L’Alcide, ïn ancien gabelou, é aiménaidgi lai fèrme de ses poirents po y péssaie sai r’tréte. Ç’ât ïn tot foûe beurcolou que sait s’ottyupaie. Sai fanne s’ennue, èlle pésse son temps drie les ridés è beûyaie les dgens d’en faice.
- T’és vu, Alcide, lai novèlle véjine, èlle é pendu di voûedge lïndge chu sai tèrrasse.
- Ah bon, que dit l’hanne, èt ran d’ pus.
Ènne snainne pus taîd, meinme sceinne.
-Mains raivoéte voûere, Alcide, ci côp, èlle é pendu ses voûedges tyulattes. Çoli poétche condangne.
- Bof, dit l’hanne, èt ran d’ pus.
Dous djouès aiprés, meinme snieule.
- Èlle refait, çte soûeyon. Mit’naint, ç’ât des oûedges paissas qu’èlle suchpend.
L’hanne se yeuve, prend ènne pannoûre èt réchue lai f’nétre.
- Èt dïnche, te vois meus
?
Note
di voûedge lïndge, du linge sale
ïn pannou, un torchon
des paissas, des petits draps à l’usage des enfants
----
Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis
La nouvelle voisine
On ne reconnaît plus le village. Les maisons ont poussé comme des champignons. «
Devant chez nous, dit Alcide, des citadins ont construit une villa avec piscine. Auparavant, il y avait des pommes de terre, du blé, on y faisait la moisson. Il y avait un pré où le paysan faisait la fenaison. L’automne, il y mettait ses vaches à brouter.
»
Alcide est un ancien douanier. Il a aménagé la ferme de ses parents pour y passer sa retraite. C’est un bricoleur sans pareil, toujours occupé. Quant à sa femme, elle s’ennuie, elle passe son temps derrière les rideaux à épier les gens d’en face.
- Tu as vu, Alcide, la nouvelle voisine, elle a suspendu son linge sale sur la terrasse.
- Ah bon, dit l’homme, sans plus.
Une semaine plus tard, même scène.
- Regarde donc, Alcide, cette fois, elle a suspendu ses petites culottes sales. C’est dégueulasse.
- Bof, dit l’homme, et rien de plus.
Le surlendemain, même rengaine.
- Elle refait, cette malpropre. Maintenant, ce sont de petits draps crasseux qu’elle suspend.
L’homme se lève, prend un torchon et essuie la fenêtre.
- Et comme ça, tu vois mieux
?