Publié : 7 avril 2018

Au restaurant

À rèchtaurant

Bernard Chapuis

Publié dans le Quotidien Jurassien le 6 avril 2018

À rèchtaurant

Ènne dyïmbarde de sport s’ râte d’vaint l’ rèchtaurant d’ lai Croux. Ènne fanne tyirie è quaitre épïndyes déchend, brelitçhes de s’raye, bianc tchaipé è lairdges oûèlattes. Èlle é les maîrmes vi roudges èt le le moère fardè. Ç’ n’ât p’ènne de poichi po étre dïnche gaupèe. Èlle conchulte l’airdoise. Èlle aippele le sèrvou : -- Vot’ airdoise ne me pyait pe. Di poûe, aidé di poûe. Èt peus tiaind que ç’ n’ât p’ di poûe, ç’ât di bûe, di vé o bïn d’ lai tcheusse. I n’ suppoétche pus. Èt peus, i tïns en mai leingne. I n’ai p’ l’invietaince de pâre di poids èt de v’ni bolége c’ment qu’on en voit d’pus en pus. -- Mains, Daime, è n’y è p’ ran qu’ d’ lai tchie. Nôs ains âchi di poûechon. Nôs ains des m’nus sains tchie. Not’ tchèf sait faire des bons p’tèts pyaits. Prentes le temps d’ révijaie lai lichte. -- Nian, nian. Aipp’lèz-me l’ paitron. L’ paitron airrive, ïn painsè éçhôçhè qui chue è grosses gottes èt que s’ panne les mains dains son d’vaintrie. -- Qu’ât-ce qu’è y é, mai boènne Daime ? -- Bondjoué, l’hanne. I ai dj’ tchaimpè ïn oeûye ch’ vôs câtches. D’vaint que d’ me décidaie, i voérros vôs d’maindaie : Vôs sèrvâtes lai dïndye. -- Bïn chûr, Daime. Nôs n’ faisans p’ de diff’reinces, nôs sèrvans tot l’ monde. Les biancs, les nois, les gros, les p’tèts, èt meinme les dïndyes. Notes è lairdges oûèlattes, à larges bords dïndye, dinde, ici dans le sens de personne niaise les maîrmes vi roudges, les lèvres d’un rouge vif bolége, obèse. ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Au restaurant

Une voiture de sport s’arrête devant le restaurant de la Croix. En descend une femme tirée à quatre épingles, lunettes de soleil, chapeau blanc à larges bords. Elle a les les lèvres d’un rouge vif et le visage fardé. Ce n’est pas une personne du coin pour être ainsi attifée. Elle consulte l’ardoise, hèle le garçon : -- Votre carte ne me plaît pas. Du porc, toujours du porc. Et quand ce n’est pas du porc, c’est du bœuf, du veau ou de la chasse. Je ne supporte plus. En outre, je tiens à ma ligne. Je n’ai aucune envie de prendre du poids et de devenir obèse comme on en voit de plus en plus. -- Mais, Madame, il n’y a pas que de la viande. Nous avons aussi du poisson. Nous avons des menus végétariens. Notre chef sait apprêter de bons petits plats. Prenez le temps de parcourir la liste. -- Non, non. Appelez-moi le patron. Le patron arrive, essoufflé. Il est ventripotent et transpire à grosses gouttes. Il s’essuie les mains dans son tablier. -- Qu’est-ce qu’il y a, ma bonne Dame ? -- Bonjour, Monsieur. J’ai jeté un œil sur votre carte. Avant de me décider, j’aimerais vous demander si vous servez la dinde. -- Bien sûr, Madame. Nous ne faisons pas de différences, nous servons tout le monde. Les blancs, les noirs, les gros, les petits, et même les dindes. Notes è lairdges oûèlattes, à larges bords dïndye, dinde, ici dans le sens de personne niaise les maîrmes vi roudges, les lèvres d’un rouge vif bolége, obèse. ---- La chronique patoise du QJ en direct :