Publié : 30 mai 2016

Qu’est-ce qu’il vaut mieux ?

Qu’ât-ce qu’è vât meu ?

Bernard Chapuis

Paru dans le Quotidien Jurassien du 27 mai 2016

Qu’ât-ce qu’è vât meu ?

{Bèlles rogations, bèlles moûchons, qu’an dyait. Les trâs maitïns aivaint l’Aiscenchion, aiprés lai mâsse, an f’sait ènne prochèchion po botaie les tchaimps dôs lai voidge di bon Dûe. Nôs, les afaints, nôs étïns tot hèy’rous. Aiprès lai prochèchion, nôs n’avïns p’fâte de r’toénaie en l’écôle. Le yundi, nôs mairtchïns djuqu’en lai croux d’ lai Hâde. È y aivait ïn bené que bèyait ènne sacré boènne âve. Le maidgi, an s’rendait en lai vie d’ Bonfô, d’ lai sens des oeutches. Le maitchedi, nôs allyïns poi les senties, djuqu’en lai ptète tchaipele â câre di bôs. Lai mâsse était és heûtes. Tos les pairoichiens y étïnt, safe le blantchie, que d’vait livraie son pain, èt l’ poitchou d’ lattres que d’vait faire sai toénèe. Lai mâsse était vite bâçhèe, mais lai prochèchion prenyait di temps, chutôt lai trâjieme. Pendant lai prochèchion, lai Sïnte-Cécile èt les fidèyes s’réponjïnt : – Sancta Agata. – Ora pro nobis. – Sancta Agnès. – Ora pro nobis. Çte bédyine de Brebre édgnelait son tchiplat. I m’sovïns d’ïn côp, i étôs menichtraint ; i poétchôs ïn say’tat d’abnète. Le tiurie puijait dains mon say’tat èt étçhissait daidroit. L’Auguste aivait son oeutche djeute poi li. -- Fotes-y en, qu’è dit â tiurie, fotes-y en pie, ç’ât mon oeuche ! -- En tai piaice, i yi bott’rais âchi di femie.} Note {menichtraint}, servant de messe {oeutsche}, jardin en plein champ. Le {tieutchi}, en revanche, est un jardin potager près de la maison. ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Qu’est-ce qu’il vaut mieux ?

Belles rogations, belles moissons, disait-on. Les trois matins précédant l’Ascension, après la messe, on faisait une procession pour placer les champs sous la protection divine. Nous, les enfants, nous étions très heureux. Après la procession, nous ne devions pas retourner à l’école. Le lundi, nous marchions jusqu’à la croix au lieu dit la Hâde. Il y avait une fontaine qui donnait une eau excellente. Le mardi, nous nous rendions au lieu dit La vie de Bonfol, dans le secteur des jardins en plein champ. Le mercredi, nous allions par les sentiers jusqu’à la petite chapelle au coin du bois. La messe était fixée à huit heures. Tous les paroissiens y participaient, sauf le boulanger, qui devait livrer son pain, et le facteur, qui devait faire sa tournée. La messe était vite expédiée, mais la procession prenait du temps, surtout la troisième. Pendant la procession, la Sainte-Cécile et les fidèles se répondaient : – Sancta Agata. – Ora pro nobis. – Sancta Agnès. – Ora pro nobis. Cette bigote de Brebre égrenait son chapelet. Je me souviens d’une fois, j’étais servant de messe, je portais l’eau bénite. Le curé puisait dans mon récipient et giclait d’abondance. Auguste avait son jardin justement là. -- Allez-y, dit-il au curé, mettez-en, c’est mon jardin ! -- A ta place, j’y mettrais aussi du fumier. La chronique patoise du QJ en direct :