Publié : 11 décembre 2015

Le Revenant

Lo R’venyaint

Bernard Chapuis

Paru dans LQJ, le 11 décembre 2015

Lo R’venyaint

Inspiré du Revenant, de Jean Rictus (1867-1933) {Dés côps, i m’ dis, tiaind qu’i vâdye È drète, è gâtche èt sains échpoir, Tiaind qu’i n’ai pus l’ drèt d’ me sietaie Ou bïn de dremi chu les baincs , * I m’ dis : Tot d’ meinme, s’è r’venyait ! Tiu çoli ?... Bïn quoi ! Vôs l’ saîtes bïn, Lo vendrecksèle de Galilèe, L’ Rossat â tiûre pus grant qu’ lai Vie ! * S’è r’venyait pie, l’Aigné sains taitche ; Ç’tu qui pus taîd meûré ch’ lai croux È trent’-trâs ans, en piein’ djûeneince Po nôs raitchtaie, nôs, ses frérats. * S’è r’venyait pie, s’è r’venyait pie, L’hanne en bieu qu’ martchait chu lai mé, Qu’aivait pidie des mâlhèy’rous, Ét qu’eur’voirichait les malaites. * L’hanne que, po les chires de son temps, N’aivait p’ lai laindye dains sai baigatte. Lu que dyait en sés bons aimis Nôs sons tus compains chu çte tiere. * Lu que répétait sains râtaie : « Ainmèz-vôs bïn lés yuns lés âtres. Fârait voûere è râtaie les dyieres Èt peus râtaie de se taupaie. * Èt encoé : Mâlhèye és croûyes rètches ! Bïnhèy’rous lés poûeres que trimant. Cés que vétyant dains lai mijére. Le reingne dés Cies ât po yos. * Éh bïn moi, hyie, i l’ai croujè, Aiprés méneût, â câre d’ènne rue. Èt grûlait dains l’hoûere de l’huvie. Mon Dûe, i en aivôs pidie. * An airait dit ïn réfugie.} ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Le Revenant

Inspiré du Revenant, de Jean Rictus (1867-1933). Gabriel Randon de Saint-Amand, qui prit le pseudonyme de Jehan Rictus est né à Boulogne-sur-Mer le 21 septembre 1867 et mort à Paris le 6 novembre 1933. C’est un poète français, célèbre pour ses œuvres composées dans la langue du peuple du Paris de son époque. On trouve le texte original de Jehan Rictus sur internet. Des fois, je me dis, lorsque j’erre A droite, à gauche et sans espoir, Quand je vois que je n’ai plus le droit de m’asseoir Ou de dormir sur les bancs, * Je me dis : Tout de même, s’il revenait ! Qui ça ?… Ben quoi ! Vous le savez bien, Le trimardeur de Galilée, Le Rouquin au cœur plus grand que la Vie ! * S’il revenait, l’Agneau sans tache, Celui qui plus tard mourut sur la croix A trente-trois ans, en pleine jeunesse, Pour nous racheter, nous, ses frères. * S’il revenait, s’il revenait L’homme en bleu qui marchait sur la mer, Qui avait pitié des malheureux Et qui guérissait les malades, * L’homme qui, pour les riches de son temps, N’avait pas la langue dans sa poche. Lui qui disait à ses amis Nous sommes tous copains sur cette terre. * Lui qui répétait sans relâche : Aimez-vous les uns les autres. Il faudrait arrêter les guerres Et enfin cesser de se battre. * Et encore : Malheur aux mauvais riches ! Bienheureux les pauvres qui peinent, Ceux qui vivent dans la misère. Le royaume des Cieux est à eux. * Eh bien, moi, hier, je l’ai rencontré, Après minuit, au coin d’une rue. Il grelottait dans le vent d’hiver. Mon Dieu, j’en avais pitié. * On aurait dit un réfugié. La chronique patoise du QJ en direct :