Publié : 24 mai 2015

Mon gosse, ce n’est pas un menteur

Mon boûebe, ç’n’ât p’ïn mentou

Bernard Chapuis

Paru dans LQJ du 22 mai 2015

Mon boûebe, ç’n’ât p’ïn mentou

- I veus voûere s’vôs èz bïn eurteni lai driere yeçon d’hichtoire. Albért, dis-me voûere tiu qu’é décreuvi l’Aiméritçhe. - Ç’n’ât p’ moi, Daime. - Te t’fos d’moi, Albért ? Te dairais aivoi grosse honte de m’répondre dïnche. - I vôs l’aichure, Daime. Ç’n’ât p’ moi, i n’aî ran è voûere d’avô çoli. - Coidge-te, nitiou ! S’te crais qu’çoli veut s’péssaie dïnche. I m’en v’allaie trovaie ton pére. Le soi, voi les sept, voili lai régente que soénne. Èls étïnt dje tus en lai tâle. - Tiu qu’ peut bïn v’ni en ces hoûeres, d’mainde lai mére. Albért, vai euvri lai poûetche. - Ç’ât lai régente, breûye le bouebat. Èlle veut djâdsaie d’aivô l’pére. - I déchends. Lai régente échplique â pére lai situachion : - È fârait ïn pô meu churvoiyie les d’vois d’vote Albért. Èt peus yi aippâre lai politèsse.Vôs s’ rendèz compte ? I yi aî d’maindè tiu ç’ât qu’é décreuvi l’Aiméritçhe. È m’é réponju : « Ç’n’ât p’moi. I n’aî ran è voûere d’avô çoli. » - Ouyietes, Daime, mon bouebe é bïn des défâts. I seus l’premie è le r’coégnâtre. Note Albért, ç’ât ïn crouye éyeuve. Ç’ât ïn féniant, ïn peurri,ïn criquèt, ïn pénibye, tot ç’qu’vôs vlèz, mains ç’n’ât p’ïn mentou. S’è vôs é dit que ç’n’ât p’lu, ç’ât que ç’n’ât p’lu. Ïn point, ç’ât tot. Bïn l’bonsoi, Daime ! ---- Ecouter la chronique lue par Bernard Chapuis

Mon gosse, ce n’est pas un menteur

-- Je veux voir si vous avez bien retenu la dernière leçon d’histoire. Albert, dis-moi qui a découvert l’Amérique. -- Ce n’est pas moi, Madame. -- Tu devrais avoir grosse honte de me répondre comme ça. -- Je vous assure, Madame. Ce n’est pas moi, je n’ai rien à voir avec ça. -- Tais-toi, gamin ! Si tu crois que ça va se passer comme ça. J’irai trouver ton père. Le soir, vers sept heures, l’institutrice sonne à la porte. Ils étaient déjà tous à table. -- Qui peut bien venir à cette heure-ci ? demande la mère. Albert, va ouvrir. -- C’est l’institutrice, crie l’enfant. Elle veut parler avec papa. -- Je descends. L’institutrice explique au père la situation : -- Il faudrait mieux surveiller les devoirs d’Albert. Et lui apprendre la politesse. Vous vous rendez compte ? Je lui ai demandé qui a découvert l’Amérique. Il m’a répondu : ce n’est pas moi. Je n’ai rien à voir avec ça. -- Ecoutez, Madame, mon garçon a bien des défauts. Je suis le premier à le reconnaître. Albert est un mauvais élève. C’est un fainéant, un paresseux, un sale gosse, un indiscipliné, tout ce que vous voulez, mais ce n’est pas un menteur. S’il vous dit que ce n’est pas lui, c’est que ce n’est pas lui. Un point, c’est tout. Bien le bonsoir, Madame ! ---- La chronique patoise du QJ en direct :