Publié : 20 février 2015

Carnage

Cairnaidge

Jean-Marie Moine

Paru dans Arc Hebdo, février 2015

Cairnaidge

 mois d’ djanvie, lai pairijienne aiyomérâchion é coégnu yun des pus grôs cairnaidges pairmé tus ces qu’ se sont prôdut en Fraince ces soichante d’rieres l’ annèes. Çoli é bïn chur toutchi note quâsi entiere bôle de tiere. Lai réjon d’ ci metirou raissembyement è Pairis, d’ ci cortége dâs lai piaice d’ lai Répubyique en ç’té d’ lai Naichion était, ô nôbye ïnmaîdge de l’ étrenâ grantou d’ lai Fraince, lai « tchie-bridâ d’ l’ échprèchion ». Les « I seus ci Charlie » çheûréchïnt tot l’ long di paircoué di cortége. Ran d’ pus normâ, l’ frainçais préjideint pe son premie menichtre ne djâsïnt quâsi ran qu’ de çoli. An ont meinme vu, dous obïn trâs djoués pus taîd, en lai télé, l’ premie menichtre poétchaie dôs son brais, d’ mâpiaî-jainne pe aifrelèe faiçon, ïn nïm’rô di Charlie Hebdo (l’ frainçais préjideint é t’ aivu pus de r’praindge) ! Dire qu’ en dous mil tçhïnje, an voit encoé tchie nôs en Urope, âtçhe d’ âchi terbéchaint pe barbère que ç’ que l’ rédgïnme d’ lai Djait (la Terreur) s’ ât trainju coupâbye dôs lai frainçaise Révôluchion. Ç’te féroch’tè è fraid d’ aîgris meurnès ât heursainne ! Enfïn, nôs dains bïn faire daivô… I n’ aî p’ bïn chur tot yét, tot ôyi tot vu ç’ qu’ les meudias aint raippoétchè chus ces è-djos. Mains i n’ aî niun ôyi s’ pojaie des quèchtions chus nôte réchponchâbyitè dains tot çoli. Po poéyait s’ baittre contre ïn mâ, po l’ poéyait maîtrâyie, è fât saivoi dâs laivoù qu’ è vïnt, èl en fât coégnâtre l’ encâse. Ât-ç’ que nôs végïns n’ confonjant p’ lai « tchie-bridâ d’ l’ échprèchion » daivô lai feurrèye (l’anarchie) ? Ât-ç’ que lai tchie-bridâ nôs bèye le drèt d’ tot faire, de tot dire, de tot graiy’naie ? È bïn nian… ! Ç’ nât p’ poch’qu’ i aî ènne dyïmbarde qu’ i aî l’ drèt, tchie nôs, d’ rôlaie è gâtche. Po chur qu’ è s’ fât baittre contre les djiâdichtes que tvant, mains…, ces qu’ aint fri è Pairis, c’était… des Frainçais ! Nôs y’ sons. Laivoù ? Poidé, en mai 1968. Aidonc qu’ le dgén’râ De Gaulle s’ bèyait taint d’ mâ po r’drassie lai Fraince, an ont vu des énèrgoumènnes s’ compoétchaie c’ment qu’ des mâcouchieints, pe tot fotre aivâ. An ont tot r’botè en quèchtion, l’ ensoin-gn’ment chutôt. È feut envoidgè d’ envoidgeaie. Les afaints n’ aint pus aivu d’ eur’péres, ès n’ aint pus saivu d’ qué sen s’ virie. L’ aibbé Piere l’aivait bïn dit : « L’ ïntègrichme ât ènne réfoûesse po lai mijére poch’qu’ èl eûffre ïn chursât d’ échpérainche en ces qu’ n’ aint ran. Qu’ yôte mâ déchpairécheuche pe l’ ïntègrichme veut piedre ses treupes ». J-M. Moine

Carnage

Au mois de janvier, l’agglomération parisienne a connu l’un des plus grands carnages parmi tous ceux qui se sont produits en France ces dernières soixante dernières années. Cela a bien sûr touché presque la terre entière. La raison de cet immense rassemblement à Paris, de ce cortège de la place de la République à celle de la Nation était, ô noble image de l’éternelle grandeur de la France, la « liberté d’expression ». Les « Je suis Charlie » fleurissaient tout le long du cortège. Rien de plus normal, le président français et son premier ministre ne parlaient presque rien que ce cela. On a même vu, deux ou trois jours plus tard, à la télévision, le premier ministre porter sous son bras, de façon déplaisante et arrogante, un numéro de Charlie Hebdo (le président français a eu plus de réserve) ! Dire qu’en 2015, on voit encore chez nous en Europe, quelque chose d’aussi effrayant et barbare que ce dont le régime de la Terreur s’est rendu coupable sous la Révolution française. Cette férocité à froid de rustres aigris est révoltante ! Enfin, nous devons bien faire avec… Je n’ai bien sûr pas tout lu, tout entendu, tout vu ce que les médias ont rapporté sur ces événements. Mais, je n’ai entendu personne se poser des questions sur notre responsabilité dans tout cela. Pour pouvoir se battre contre un mal, pour pouvoir le maîtriser, il faut savoir d’où il vient, il faut en connaître la cause. Nos voisins ne confondent-ils pas la « liberté d’expression » avec l’anarchie ? Est-ce que la liberté nous donne le droit de tout faire, de tout dire, de tout écrire ? Et bien non… ! Ce n’est pas parce que j’ai une voiture que j’ai le droit, chez nous, de rouler à gauche. Certes, il faut se battre contre les djihadistes qui tuent, mais…, ceux qui ont frappé à Paris, c’était… des Français ! Nous y sommes. Où ? Parbleu, en mai 1968. Alors que le général De Gaulle se donnait tant de mal pour redresser la France, on a vu des énergumènes se comporter comme des inconscients et tout flanquer par terre. On a tout remis en question, l’enseignement surtout. Il fut interdit d’interdire. Les enfants n’ont plus eu de repères, ils n’ont plus su de quel côté se tourner. L’abbé Pierre l’avait bien dit : « L’intégrisme est un refuge pour la misère parce qu’il offre un sursaut d’espérance à ceux qui n’ont rien. Que leur mal disparaisse et l’intégrisme perdra ses troupes ».   J-M. Moine