Par : Fleury LJ
Publié : 16 janvier 2014

Georges Clemenceau

Ci Dgeoûerdges Clémenceau

Jean-Marie Moine

Paru dans Arc Hebdo, 15 janvier 2014

Ci Dgeoûerdges Clémenceau

Tiaind qu’i étôs p’tét, qu’ i allôs en l’ écôle di v’laidge de Mont’gnez, c’ était encoé l’ temps d’ lai ch’conde mondiâ dyierre. Ïn djoué qu’ mon grant-pére m’aivait moinnè en note tchaimp qu’ an aipp’lait « L’ carrè », è m’ môtré ci tot p’tét câre de Fraince laivoù qu’ se trove le v’laidge de Coéchèlles. I me s’vïns qu’ i n’ en r’veniôs p’ ! Nôs aivïns raivvoétie pus d’ïn côp ènne câtche laivou qu’ lai Suisse était voidge pe lai Fraince bieûve. Dâli, i craiyôs qu’ les tieulèes d’ lai naiture n’ étïnt p’ les meinmes dans ces dous paiyis…, poétchaint, les aîbres, les tch’mïns, les mâjons, etc. r’sannïnt tot pitçhe en ç’ qu’ i voiyôs è Montg’nez ! En l’ écôle, le raicodjaire épreuvait d’ nôs faire è compâre ç’ que c’ était qu’ lai dyierre, que trïmbâlait daivô lée, lai moûe, lai seûffraince, lai déchtrucchion, lai pavou, lai hay’nainche, en ïn mot, tot l’ mâ, lai trétoiye pe lai mijére qu’ an peut trovaie chus note poûere bôle de tiere. È nôs diait qu’ lai Fraince aivait lai tchaince d’aivoi ïn hanne de grôsse valou : le dgén’râ de Gaulle. È vierèvait s’vent l’ dgén’râ De Gaulle en ïn âtre grôs frainçais l’ hanne qu’ lai Fraince aivait aivu ènne tote grôsse fâte di temps d’ lai premiere mondiâ dyierre : ci Dgeoûerdges Clémenceau. Note régent nôs échpyiquait que ç’t’ hanne, qu’ an aipp’lait âchi le Tigre foûech’ que c’ était ïn baittaint, s’ était fait brâment d’ feuraimis, mains qu’ â fond, c’ était ïn douçat l’ hanne. Tiaind qu’ è feut nanmè â pouvoi, è s’ conchaicré tot entie en lai dyierre. « I fais lai dyierre » qu’ è diait. Tiaind qu’ èl allait â moitan d’ses soudaîts ch’ le frount, è tçhittait les traintchies pe breûyait és allmoûess soudaîts : « Nôs vôs v’lans aivoi ! ». È n’ mainquait p’ d’humoé. Ïn côp qu’ èl était raivu dains sai mâjon en Vendèe, an n’ voyait quâsi pus ran dains son poiye. Des dgens, qu’ étïnt poi li, yi diainnent : ç’ ât les grôs l’ aîbres di covent des djéjuites que pregnant tot l’ djoué. Allètes dire â djéjuite Pére de faire è débraintchie ces aîbres. Tiaind qu’ çoli feut fait, ç’t’ aintimôtieyâ Clémenceau graiy’né ènne petéte lattre â djéjuite Pére que c’mençait dïnche : « Mon Pére, i peus vôs aipp’laie mon Pére, poch’que vôs m’ èz r’bèyie l’ djoué ». Chus quoi l’ djéjuite Pére yi réponjé : « Mon fé, i peus vôs aipp’laie mon fé, pochqu’i vôs aî fait è voûere le cie ! » I m’ muse en tot çoli, en ci saivoi-vivre, aiprés l’ vôte di vinte-quaitre de nôvembre, en m’ seûv’niaint de totes les croûey’tès pe les mentes qn’ i aî poéyu yére dains les jurassiennes feuyes…, ces d’ries mois ! J-M. Moine

Georges Clemenceau

Quand j’étais petit, que j’allais à l’école du village de Montignez, c’était encore le temps de la seconde guerre mondiale. Un jour, alors que mon grand-père m’avait conduit à notre champ qu’on appelait « Le Carré », il me montra un petit coin de France où se trouve le village de Courcelles. Je me souviens que je n’en revenais pas ! Nous avions regardé plus d’une fois une carte où la Suisse était verte et la France bleue. Donc, je croyais que les couleurs de la nature n’étaient pas les mêmes dans ces deux pays…, cependant, les arbres, les chemins, les maisons, etc. étaient semblables à ce que je voyais à Montignez ! A l’école, l’instituteur essayait de nous faire comprendre ce qu’était la guerre, qui trimbalait avec elle,la mort, la souffrance, la destruction, la peur, la haine, en un mot, tout le mal, la trahison et la misère qu’on peut trouver sur notre terre. Il nous disait que la France avait la chance d’avoir un homme de grande valeur : le général de Gaulle.Il comparait souvent le général de Gaulle à un autre grand homme français dont la France avait eu grand besoin pendant la première guerre mondiale : Georges Clemenceau. Notre régent nous expliquait que cet homme, qu’on appelait aussi le Tigre tant c’était un battant, s’était fait beaucoup d’ennemis, mais qu’au fond, c’était un homme doux. Quand il fut nommé au pouvoir, il se consacra tout entier à la guerre. « Je fais la guerre » disait-il. Quand il allait au milieu de ses soldats sur le front, il quittait les tranchées et criait aux soldats allemands : « Nous vous aurons ! ». Il ne manquait pas d’humour. Une fois qu’il était retourné dans sa maison en Vendée, on ne voyait presque plus rien dans sa chambre. Des gens, qui étaient par là, lui dirent : ce sont les gros arbres du couvent des jésuites qui prennent tout le jour. Allez dire au Père jésuite de faire élaguer ces arbres. Quand ce fut fait, cet anticlérical Clemenceau écrivit une petite lettre au Père jésuite qui commençait ainsi : »Mon Père, je peux vous appeler mon Père, puisque vous m’avez redonné le jour ». A quoi le Père jésuite répondit : « Mon fils, je peux vous appeler mon fils, puisque je vous ai fait voir le ciel ! ». Je pense à tout cela, à ce savoir-vivre, après le vote du vingt-quatre novembre, en me souvenant de toutes les méchancetés et les mensonges que j’ai pu lire dans les journaux jurassiens…, ces derniers mois ! J-M. Moine